CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 3 mai 2001

La séance est ouverte à 10 heures.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

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*  *  *

LA LOI SUR LES ARRANGEMENTS FISCAUX ENTRE LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL ET LES PROVINCES

 

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-18, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, dont le comité a fait rapport sans propositions d'amendement.  

L'hon. Lawrence MacAulay (au nom du ministre des Finances) propose: Que le projet de loi soit agréé à l'étape du rapport.

(La motion est adoptée.)

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec la permission de la Chambre, maintenant?

Des voix: D'accord.  

L'hon. Lawrence MacAulay (au nom du ministre des Finances) propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

 

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M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir l'occasion de m'adresser à la Chambre dans le cadre du débat de troisième lecture du projet de loi C-18, qui modifie la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces en ce qui a trait au programme de péréquation. Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui donne suite à l'engagement qu'a pris le premier ministre en septembre dernier, lors de la réunion des premiers ministres, d'abolir le plafond du programme de péréquation pour l'exercice 1999-2000.

[Français]

En plus de prendre cet engagement, le premier ministre a invité le ministre des Finances à consulter ses homologues des provinces et des territoires au sujet de la meilleure façon d'assurer le suivi. Le ministre des Finances a terminé ses consultations avant le dépôt du projet loi le 15 mars.

[Traduction]

À la réunion des premiers ministres, des accords historiques ont été conclus dans le but d'établir un plan visant à renouveler le système de santé, à améliorer le soutien accordé au développement de la petite enfance et à renforcer d'autres programmes sociaux. Ces accords ont conduit à l'adoption, durant la dernière législature, du projet de loi C-45, qui prévoyait la plus grande contribution fédérale jamais faite au titre de la santé, de l'enseignement postsecondaire, du développement de la petite enfance et d'autres programmes sociaux.

[Français]

L'investissement fédéral dans ces domaines totalisera, au cours des cinq prochaines années, 23,4 milliards de dollars, dont 21,1 milliards de dollars dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.

[Traduction]

Comme les députés le savent, le TCSPS est un des trois programmes de transfert au moyen desquels le gouvernement fédéral fournit de l'aide aux provinces pour les soins de santé et d'autres programmes sociaux. Les deux autres programmes sont la formule de financement des territoires et la péréquation, qui est le sujet du débat d'aujourd'hui. Actuellement, le gouvernement fédéral transfère environ 40 milliards de dollars aux provinces et territoires grâce à ces trois programmes.

Le programme de péréquation a pour objet de veiller à ce que les provinces moins prospères soient en mesure de fournir des services publics sensiblement comparables à ceux des provinces plus riches, et ce, tout en s'assurant que leurs impôts sont comparables. Depuis qu'il a été établi en 1957, le programme de péréquation a joué un rôle important dans la définition de l'essence même de la fédération canadienne. Il exprime de bien des façons la générosité des Canadiens.

[Français]

Le programme est unique parmi les transferts fédéraux, en ce sens que son objectif a été enchâssé dans la Constitution canadienne en 1982.

La Constitution précise ce qui suit, et je cite:

[Traduction]

Le Parlement et le gouvernement du Canada prennent l'engagement de principe de faire des paiements de péréquation propres à donner aux gouvernements provinciaux des revenus suffisants pour les mettre en mesure d'assurer les services publics à un niveau de qualité et de fiscalité sensiblement comparables.

La péréquation se distingue aussi en ce qu'elle a été l'un des très rares programmes qui n'ont pas été touchés à l'époque où le gouvernement avait du mal à remettre de l'ordre dans les finances de l'État. Cela montre l'importance que le gouvernement attache au programme comme élément essentiel de notre tissu social.

Les paiements de péréquation sont inconditionnels, et les provinces peuvent dépenser l'argent comme bon leur semble. En 2000-2001, les sept provinces qui ont reçu des paiements de péréquation ont été Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Québec, le Manitoba et la Saskatchewan. Les paiements ont totalisé 10,8 milliards de dollars.

Depuis 1993, les montants accordés par le programme ont augmenté de 33 p. 100, soit de 2,7 milliards de dollars. Ce rythme de croissance montre clairement que le gouvernement comprend l'importance de la péréquation pour les provinces qui y ont droit.

D'après les estimations, qui sont mises à jour deux fois l'an, le programme a atteint un nouveau sommet. Pendant la même période, d'autres dépenses de programme non liées aux transferts ont augmenté de 2,6 p. 100. Selon les dernières estimations, que le ministre des Finances a publiées en février dernier, les versements aux provinces seront d'environ 1,8 milliard de dollars supérieurs à ce qu'on avait estimé en octobre dernier. Cela s'explique en grande partie, au cours des deux dernières années, par la croissance exceptionnellement vigoureuse de l'Ontario, l'une des provinces qui ne reçoivent pas de paiements de péréquation, et non par la mauvaise performance économique des provinces bénéficiaires. L'économie de ces provinces a progressé chaque année.

 

.1120 +-

[Français]

Le 27 février 2001, le ministre des Finances a annoncé que les paiements de péréquation augmentaient immédiatement d'environ un milliard de dollars. De cette somme, 52 millions dollars sont pour 1999-2000 et 955 millions de dollars pour 2000-2001. Une autre somme de 800 millions de dollars sera versée aux provinces à l'adoption de ce projet de loi.

[Traduction]

Comme je l'ai fait à l'étape de la deuxième lecture, je tiens à rappeler que des fonctionnaires fédéraux et provinciaux examinent le programme de péréquation de façon continue afin de veiller à ce que les écarts qui existent entre provinces au chapitre de la capacité de produire des recettes soient mesurés aussi précisément que possible. De tels travaux sont actuellement en cours. En outre, la législation relative à la péréquation est renouvelée tous les cinq ans, le dernier renouvellement remontant à 1999.

La capacité d'une province d'offrir des services publics est évidemment fonction du rendement de son économie. Par conséquent, les paiements de péréquation sont fondés sur une formule qui mesure la performance relative des économies provinciales. Cette formule est appliquée de la même façon à toutes les provinces et est rajustée automatiquement en fonction de l'évolution de l'économie des provinces.

Lorsque l'économie d'une province connaît une croissance supérieure à celle des autres provinces, ses paiements de péréquation diminuent automatiquement. Par contre, lorsque l'économie d'une province ralentit ou que sa capacité financière diminue par rapport aux autres provinces, son transfert de péréquation est automatiquement majoré. Ainsi, le programme de péréquation stabilise automatiquement les recettes des gouvernements provinciaux.

Les députés devraient savoir que les provinces ne reçoivent pas toutes le même paiement de péréquation parce que leur situation économique n'est pas la même. Ainsi, cette année, la Saskatchewan a besoin de 230 $ par personne pour être ramenée au niveau de la norme, tandis que Terre-Neuve a besoin de 2 000 $ par personne. Les paiements de péréquation sont assujettis à des dispositions de plafonnement et de seuil.

[Français]

La disposition de plafonnement—qui n'a été appliquée que dans cinq des 20 dernières années—permet au programme de croître à un rythme soutenable pour le gouvernement fédéral. En fixant un paiement maximal, cette disposition fait en sorte que le Programme ne croît pas à un rythme anormalement élevé.

[Traduction]

En revanche, le seuil protège les provinces contre toute diminution soudaine et importante des paiements de péréquation qui serait autrement justifiée par l'application directe de la formule.

Contrairement à ce que certains prétendent, le plafond de péréquation ne réduit pas les droits à péréquation. Il permet plutôt que la croissance du programme reflète le taux de croissance de l'économie, assurant ainsi la viabilité du programme à long terme. Selon les prévisions de croissance du PIB établies dans l'énoncé économique et la mise à jour budgétaire d'octobre dernier, le plafond passera à 12,5 milliards de dollars en 2003-2004.

Je voudrais maintenant parler du projet de loi dont nous discutons aujourd'hui qui abolit le plafond de péréquation pour l'exercice 1999-2000 et pour cet exercice seulement. Comme je l'ai expliqué plus tôt, l'abolition du plafond fait suite à l'engagement qu'a pris le premier ministre à cet égard à la réunion des premiers ministres tenue en septembre dernier. Le communiqué diffusé à la fin de la réunion précisait clairement que:

Le Premier ministre a convenu de prendre les mesures nécessaires pour qu'aucun plafond ne soit appliqué à l'année financière 1999-2000. Par la suite, la formule de péréquation établie s'appliquera, la péréquation augmentant au rythme de croissance du PIB.

Alors que le coût final de l'abolition du plafond ne sera connu qu'en automne 2002, c'est-à-dire au moment de la diffusion des prévisions finales pour 1999-2000, on estime qu'il s'élèvera à 792 millions de dollars.

 

.1125 +-

[Français]

Cette somme sera répartie entre les sept provinces bénéficiaires selon le nombre d'habitants. Pour déterminer le paiement qui sera versé à chacune, on multiplie la somme par habitant par le total de la population de chaque province bénéficiaire.

[Traduction]

Toutes les provinces admissibles toucheront 67 $ de plus par personne. Si nous voulons présenter les choses différemment, voici la ventilation par province. Terre-Neuve recevra 36 millions de dollars. L'Île-du-Prince-Édouard sera admissible à 10 millions de dollars. La Nouvelle-Écosse aura droit à 62 millions de dollars. Le Nouveau-Brunswick touchera 50 millions de dollars. Le Québec obtiendra 489 millions de dollars. Le paiement au Manitoba sera de 76 millions de dollars. Quant à la Saskatchewan, elle aura droit à 69 millions de dollars.

En conclusion, le gouvernement est conscient que toutes les régions du pays ne peuvent produire les mêmes recettes pour financer leurs services publics. Les transferts fédéraux aident donc à faire deux choses: tout d'abord, faire en sorte que les programmes importants soient financés comme il se doit et, ensuite, s'assurer que tous les Canadiens reçoivent des services raisonnablement comparables, peu importe où ils vivent au Canada. Le projet de loi C-18 contribue à la réalisation de ces objectifs.

[Français]

Il met en relief le caractère prioritaire du Programme de péréquation pour le gouvernement et il fait en sorte que les provinces bénéficiaires continuent de disposer des ressources dont elles ont besoin pour fournir les services que veulent leurs contribuables et dont ils ont besoin.

[Traduction]

En outre, le projet de loi donne suite à l'engagement que le premier ministre a pris d'abolir le plafond de péréquation pour l'exercice 1999-2000, ce qui signifie que les provinces bénéficiaires toucheront plus d'argent.

Le projet de loi C-18 poursuit la tradition d'équité qui caractérise le programme de péréquation depuis plus de 40 ans. J'exhorte tous les députés à appuyer ce projet de loi et à l'adopter sans tarder.

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir, au nom des électeurs de Calgary-Est, dans le débat sur le projet de loi C-18.

D'entrée de jeu, je tiens à préciser, catégoriquement, que l'Alliance canadienne est favorable au principe de la péréquation. Notre parti est vraiment d'accord avec le principe selon lequel, d'un bout à l'autre du pays, tous les Canadiens devraient avoir accès à des services comparables. L'Alliance canadienne croit fermement que la méthode de péréquation garantit un bon niveau de vie à tous les Canadiens.

Cependant, nous ne sommes pas d'accord avec la manière dont le gouvernement applique la formule de péréquation et dont il semble l'utiliser pour se faire du capital politique.

Madame la Présidente, je tiens dès maintenant à vous signaler que je vais partager mon temps de parole avec mon collègue de Kelowna.

Le projet de loi élimine le plafond et augmente le paiement maximal demandé par les provinces. Nous croyons que le système de péréquation devrait avoir l'objectif à plus long terme de favoriser de façon égale la croissance économique et l'autonomie de toutes les régions, et qu'il ne devrait pas inciter les gouvernements provinciaux à adopter des politiques économiques perverses.

La hausse du paiement maximal représente une réaction unique et ponctuelle qui ne fait rien pour corriger les problèmes plus graves et plus persistants, et elle a été promise simplement à des fins politiques. Cette hausse serait peut-être avantageuse politiquement, mais on se demande vraiment si elle procède d'une bonne politique.

Qu'on songe seulement à proposer une solution temporaire traduit la nécessité de tenir un débat ouvert au Parlement afin de réviser le programme de péréquation. Le projet de loi fait partie d'un effort politique visant à compenser la coupe insensée de 23 milliards de dollars ou de 35 p. 100 que le gouvernement fédéral a faite dans le financement des soins de santé.

 

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À la conférence des premiers ministres, le gouvernement a accepté de hausser le TCSPS, mais il n'a jamais rétabli le financement au niveau de 1995. Les provinces ont donc demandé plus d'argent pour remédier aux problèmes du secteur de la santé. La crise a donc été provoquée pour commencer par le gouvernement quand il a réduit le TCSPS. Pour rétablir un certain équilibre et bien paraître, le gouvernement a dit qu'il donnerait 792 millions de dollars aux provinces. C'est pour combler le manque à gagner qu'il avait causé en ne portant pas les paiements du TCSPS au niveau de 1995, comme il avait été convenu à la conférence des premiers ministres. Le gouvernement essaie donc de faire de la politique en haussant le plafond pour remédier au problème, chose qu'il n'a pas réussi à faire initialement.

Le secrétaire parlementaire a dit pourquoi il est nécessaire de hausser le plafond, et nous sommes d'accord. Autrement, les dépenses monteront en flèche et échapperont à tout contrôle. Nous avons vu lors des dernières élections l'argent accordé au futur prétendant probable au poste de premier ministre, le ministre de l'Industrie, qui a reçu plus d'argent en paiements de péréquation juste avant les élections afin qu'il puisse faire bonne figure à Terre-Neuve.

Ce n'est pas un secret nulle part au Canada qu'en réduisant le TCSPS, le gouvernement a provoqué une crise dans le domaine de la santé d'un océan à l'autre. Dans ma circonscription, des gens sont venus nous dire comment ils avaient souffert des coupes effectuées dans la santé.

D'une part, le gouvernement fédéral a la Loi canadienne sur la santé. Nous ne trouvons rien à redire à la loi comme telle, mais le gouvernement s'en sert comme d'un bâton pour mettre les provinces au pas et leur faire comprendre comment il faut assurer les services de santé. D'un autre côté, le gouvernement a réduit l'enveloppe qu'il est censé remettre aux provinces afin qu'elles puissent gérer à leur manière leur système de santé. Cela est contradictoire.

Nous sommes d'accord avec les cinq principes de la Loi sur la santé. En fait, nous avons tenté de faire ajouter un sixième principe à la Loi, le financement stable des soins de santé, de sorte que les provinces n'aient plus à composer avec un gouvernement qui réduit à son gré l'enveloppe des soins de santé, tout en refusant de modifier la Loi sur la santé et en ne laissant pas aux provinces la latitude voulue pour assurer comme elles l'entendent la prestation de leurs services de santé.

C'est la population canadienne qui jugera les provinces sur la façon dont elles assurent la prestation des soins de santé et qui déterminera s'il y a lieu d'avoir recours au secteur privé. Je le répète, nous ne favorisons pas un régime de soins de santé à deux vitesses. Comme le gouvernement de l'Alberta l'a dit très clairement en présentant son projet de loi 11, il faut trouver des moyens innovateurs d'assurer la prestation des services de santé, compte tenu du manque à gagner résultant des coupures du gouvernement fédéral.

Après avoir fermé le robinet, le gouvernement fédéral s'est vanté d'avoir réalisé l'équilibre budgétaire, laissant les provinces se débrouiller avec la prestation des services de santé. Comme nous le savons tous, l'accroissement démographique exercera des pressions de plus en plus lourdes sur le régime de soins de santé. Le porte-parole de notre parti pour les questions relatives à la santé, ma collègue de Calgary—Nose Hill, s'envolera bientôt pour l'Europe où elle examinera les pratiques qui ont cours là-bas en matière de soins de santé.

Le rapport sur les soins de santé au Canada conclut que l'efficacité de la prestation des services n'est pas à la hauteur des sommes investies. Il faut agir. En passant, j'ai lu dans un rapport, aujourd'hui, que le premier ministre de l'Ontario réclame plus d'argent du fédéral et qu'il estime que les surplus fédéraux devraient être consacrés à la santé.

 

.1135 +-

C'est ce que demande tout le monde, dans les provinces. Les Canadiens qui recourent aux services de santé exigent que le système soit amélioré. Les travailleurs de la santé, vu la pénurie d'infirmières, ainsi que les médecins et les malades exigent tous un meilleur système de santé, car le système actuel se dégrade. Tout cela a commencé parce que le gouvernement a réduit le financement de la santé. Il l'a fait en 1995. Même lorsqu'il a voulu l'augmenter et même lorsqu'il a organisé une conférence des premiers ministres, il n'a pas ramené le financement au niveau de 1995. Il y a aussi l'inflation et tous les autres facteurs. Lorsque nous tenons compte de tous les chiffres, de l'expansion et de la croissance des services qui s'impose, nous voyons que le manque à gagner dans le système de santé est plus important que les chiffres ne l'indiquent.

Les députés, ceux de l'opposition et—j'en suis persuadé—ceux du gouvernement, reçoivent de nombreux appels de personnes qui recourent aux services de santé et qui nous disent combien elles ont du mal à obtenir des services. Les nantis exigent que nous agissions, car, bien qu'ils aient l'argent pour obtenir ces services aux États-Unis, ils estiment que ce n'est pas la chose à faire lorsque nous sommes censés disposer d'un système public de santé.

Le gouvernement ferme les yeux et vante ce qu'il faisait à l'époque où le système de santé était efficace. Oui, il était efficace, mais la demande existait avant les compressions. Le ministre de la Santé ne cesse de dire que le système de santé est efficace. Il porte des oeillères. Il ferme les yeux, puis s'époumone à nous dire, au Parlement, qu'il est en faveur d'un système public de santé et que le gouvernement maintiendra les cinq principes du système de santé canadien. Il ne cesse de le répéter.

Tout cela est bien beau, mais il oublie de nous dire que le ministre des Finances réduit constamment le financement. Ce n'est bien sûr pas lui qui assure la prestation des services dans le domaine des soins de santé. Ce sont les provinces qui s'en chargent et ces dernières aimeraient bien savoir comment elles y arriveront alors que le gouvernement fédéral ne cesse de réduire le financement à ce chapitre.

Il y a une entente au titre du TCSPS. Le gouvernement fédéral verse de l'argent aux provinces en vertu du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Le gouvernement affirme qu'il s'est penché sur cette question. L'a-t-il vraiment fait? Non. Il ne s'est pas penché sur cette question du tout puisque les médias, tant écrits que parlés, nous rapportent que les provinces ont toujours des difficultés et réclament des solutions innovatrices pour régler leurs problèmes.

Le gouvernement a fini par se réveiller et a mis sur pied une commission chargée d'examiner les soins de santé qui est présidée par l'ancien premier ministre de la Saskatchewan, M. Romanow, et qui, je crois, a entrepris ses travaux il y a deux jours. Je dois dire que les premiers ministres Klein et Mike Harris ont bien fait de dire qu'ils voulaient que tout soit remis sur la table. Je suis très heureux que M. Romanow ait dit qu'il mettrait tout sur la table. Enfin nous avons quelqu'un qui est prêt à examiner toute la situation et à tenter de voir comment nous pouvons améliorer la prestation des soins de santé.

Pour ce qui est de la péréquation, je répète que nous sommes d'accord avec ce principe parce que nous croyons que tous les Canadiens, où qu'ils soient au pays, devraient avoir accès à des services gouvernementaux importants qui soient comparables sur le plan de la qualité et du niveau. Toutefois, nous ne sommes pas d'accord, comme d'habitude, avec la façon dont le gouvernement mène certaines choses. Ce n'est pas parce nous nous opposons au principe de la péréquation que nous sommes contre le projet de loi, c'est plutôt en raison de la façon dont ce dossier est traité et dont les choses sont effectuées, parce que nous sommes d'avis que ce n'est pas la meilleure façon de le faire.

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Est-ce que le député a le consentement unanime pour partager son temps de parole?

Des voix: D'accord.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je suis heureux de participer à ce débat. J'espère que le secrétaire parlementaire prendra des notes et transmettra certains messages au ministre des Finances, car j'ai l'intention d'aborder des choses qu'il aurait selon moi tout intérêt à communiquer au ministre des Finances.

 

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Comme mon collègue vient tout juste de le souligner, l'Alliance canadienne n'est pas opposée aux paiements de péréquation. Ces paiements sont tout à fait essentiels car le degré de développement économique des provinces varie. Certaines sont très riches et d'autres ne le sont pas autant, et il existe une façon d'équilibrer les choses. Nous convenons certes que les provinces ne devraient pas être pénalisées parce que leur économie est en difficulté ou qu'elles ne possèdent pas certaines ressources naturelles et ainsi de suite. Elles devraient rester en mesure de dispenser des programmes et services qui sont en gros comparables à ceux des autres provinces. Nous sommes d'accord avec ce principe.

Ce n'est pas vraiment cela qui est en cause. Je veux aborder la façon dont la mesure législative a été présentée. Le premier problème, c'est que cette mesure législative a un effet rétroactif. À mon avis, c'est très répréhensible.

Le ministre des Finances et le premier ministre ont engagé des dépenses sans autorisation parlementaire préalable. C'est une insulte aux députés de ce côté-ci de la Chambre et à leurs collègues d'en face. Nous sommes ici pour contrôler les finances du pays et trouver la meilleure façon possible de répartir l'argent entre les diverses provinces.

Je tiens aussi à souligner que je n'approuve pas la façon dont le secrétaire parlementaire a fait le coq en soulignant, comme pour se vanter, à quel point le gouvernement avait agi de façon remarquable en augmentant le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, comme si le gouvernement avait accordé aux provinces quelque chose de neuf ou de plus que ce qu'elles avaient auparavant. Le problème avec ce qu'il a dit et avec ce que le ministre des Finances a dit avant lui, c'est que, en quelque sorte, cela ne remplace même pas ce qui a été supprimé. Quel genre de situation est-ce quand le gouvernement demande aux gens s'ils ne sont pas heureux qu'on leur donne 21 milliards de dollars pour dire ensuite, surprise, on vous en reprend 22 milliards? C'est l'inverse de la logique.

Certains d'entre nous sont des parents et donnent une allocation de 5 $ à leur enfant. Supposons qu'une année les choses n'aillent pas très bien; nous diminuons son allocation de 2 $ et nous lui donnons 3 $. L'année suivante, nous lui disons que nous allons rétablir son allocation. Que pense-t-il immédiatement? Il pense qu'il va recevoir 5 $, mais on ne lui donne que 4 $ et on appelle ça le rétablissement de son allocation, ce qui n'est pas le cas. C'est ce qui se passe ici.

Je pense qu'il faut faire très attention à la manière dont on crée le message. Disons la vérité telle qu'elle devrait l'être.

Le secrétaire parlementaire a dit des choses très intéressantes au sujet de la formule de péréquation. C'était excellent. Il faut que nos auditeurs sachent comment fonctionne la formule de péréquation. Malheureusement, nous n'avons pas le temps d'entrer dans les détails de la formule pour voir exactement comment elle fonctionne.

Il y a des particularités très intéressantes dans la formule elle-même. Elle ne produit pas toujours le même résultat même si on aurait crû qu'en utilisant les mêmes chiffres on aurait obtenu des résultats similaires. Les bases qui servent au calcul, d'une province à l'autre, dépendent en grande mesure des résultats qu'on veut obtenir. C'est pourquoi il y a des disparités dans la formule même.

Nous n'avons pas le temps maintenant d'entrer dans ces détails, mais le député sait que c'est en fait le cas et qu'il devrait retourner au ministère des Finances et retravailler certains de ces détails afin que les bases qui sont utilisées dans le calcul du montant des paiements de péréquation soient comparables, justes et équitables d'une province à l'autre, et qu'ils soient rajustés comme ils devraient l'être. Il y a bien un mécanisme de rajustement, mais je ne pense pas qu'il soit suffisant à l'heure actuelle.

L'autre chose que nous voulons souligner est que le plafond est éliminé pour un an. C'est l'assurance qu'on nous a donnée. Je ne sais pas combien de personnes ici à la Chambre ont déjà fait l'expérience d'une situation telle que celle-ci.

 

.1145 +-

Lorsqu'on hausse un plafond, quelles sont les attentes pour l'année suivante? Il me semble qu'on voudra atteindre encore une fois ce nouveau plafond. Ce qui a semblé constituer une limite maximale devient donc un minimum ou une attente. C'est exactement ce qui se produira dans le présent cas, je le crains. Le plafond sera relevé de 800 millions de dollars environ cette année et l'année prochaine, on insistera pour qu'il soit relevé à nouveau.

Revenons aux transferts consentis dans le contexte du TCSPS. Ce programme gouvernemental transfère des sommes aux provinces pour la santé et les services sociaux. Il est nettement conçu comme un régime spécial et vise habituellement les services sociaux, l'éducation et la santé. Ce sont les trois grands secteurs touchés.

Les transferts du TCSPS doivent remplir une fonction bien précise. Le gouvernement a mis en place une formule de péréquation et on soutient que cette formule aide certaines provinces. Lors de l'élaboration de l'entente avec les premiers ministres, ceux-ci ont demandé une formule de péréquation dont le plafond pourrait être relevé pour qu'ils puissent subventionner les transferts du TCSPS. Voilà l'impact concret de cette mesure.

Le gouvernement paye donc deux fois pour la même chose, sous deux rubriques différentes. C'est déplorable car les Canadiens sont faussement portés à croire que les transferts du TCSPS sont suffisants et que les paiements de péréquation servent à toutes les autres fins, alors que ce n'est pas ce qui se produit. Nous devons prendre soin de dire la vérité, dans ce domaine comme dans les autres. Le gouvernement doit reconnaître ces points.

L'autre chose que je veux dire, c'est que le gouvernement doit agir en fiduciaire des fonds publics. Quand on voit comment cet argent est dépensé, on se demande si le rôle du gouvernement consiste simplement à arracher le plus d'argent possible aux contribuables et à le donner lorsqu'on lui en demande plus. Est-ce là le rôle du gouvernement? Je ne le crois pas. Le gouvernement devrait considérer les fonds publics comme de l'argent que les citoyens lui confient et qu'il doit gérer en leur nom.

Dans ce contexte, j'aimerais parler de quelque chose dont je voudrais que le secrétaire parlementaire du ministre des Finances informe le ministre. Il s'agit d'une lettre que j'ai reçue d'un de mes électeurs. L'auteur de la lettre écrit:

M. Schmidt, je vous renvoie un chèque de 125 $ émis au nom de ma mère. Vous devez certainement recevoir beaucoup de chèques de ce genre. Vous conviendrez certainement que cette façon qu'a le gouvernement fédéral de distribuer des fonds est ridicule.

Ma mère, qui est décédée en octobre 2000, a vécu les dix dernières années de sa vie dans un établissement de soins prolongés. Je n'ose imaginer combien d'argent, provenant de la poche des contribuables, a été gaspillé.

Les députés se demanderont peut-être de quoi il s'agit. La dame est décédée en octobre 2000. Le 31 janvier 2001, elle a reçu un chèque d'allocation au titre des frais de chauffage, versé dans le cadre d'un programme financé entièrement par le gouvernement fédéral. La prestation consistait en un remboursement unique de la taxe aux personnes et aux familles à revenus faible et moyen, afin de compenser le coût de leurs frais de chauffage. Cette dame n'avait pas payé de frais de chauffage depuis au moins dix ans et elle est décédée en octobre 2000. Quatre mois après sa mort, elle a reçu un chèque.

Le talon du chèque indiquait ce qui suit:

Nous avons établi que vous êtes admissible à un chèque d'un montant de 125 $ en guise d'allocation au titre des frais de chauffage.

En vertu de quels critères cette décision a-t-elle été prise? Elle ne reposait certainement pas sur le fait que la dame était vivante. Lui a-t-on accordé l'allocation parce qu'elle était morte? Parce qu'elle vivait dans un foyer depuis dix ans? Ou parce qu'elle avait un fils ou une fille? Sur quels critères s'est-on fondé?

 

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M. Roy Cullen: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'écoute notre collègue parler de l'allocation pour frais de chauffage et je ne peux pas voir en quoi cela touche la formule de péréquation dont il est question dans le projet de loi dont la Chambre est saisie aujourd'hui.

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Comme les députés le savent, il y a beaucoup de souplesse dans ce qui peut être dit dans le cadre du débat à la Chambre des communes.

M. Werner Schmidt: Madame la Présidente, je remercie le secrétaire parlementaire de soulever la question. Je pense que cela souligne le point que j'ai abordé au préalable.

Je lui ai dit, ainsi qu'à tous les députés d'en face, surtout les ministériels, que nous devons considérer les deniers publics que nous percevons comme une fiducie que nous gérons au nom des contribuables. Nous devons le faire avec intégrité, avec beaucoup de jugement et dans les meilleures intentions du monde pour répondre aux besoins de nos citoyens. C'est ce que nous devons faire.

Cet exemple ne témoigne pas d'une analyse approfondie. Il n'est pas question d'agir dans l'intérêt des Canadiens. Rien ne montre que cela aide cette femme. Que faisons-nous au sujet de cette dame qui est dans sa tombe? Que va-t-elle faire avec 125 $? Elle ne peut même pas encaisser le chèque. C'est ce que j'essaie de dire. Je pense que nous devons vraiment tenir compte des préoccupations de ce genre.

Il faut également voir exactement ce que le projet de loi ferait. Il supprimerait le plafond de 10 milliards de dollars pour les paiements de péréquation de 1999 et ajouterait environ 800 millions de dollars pour les sept provinces admissibles à ces transferts: Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Québec, le Manitoba et la Saskatchewan.

On sait déjà que ce programme est conçu pour que ces provinces puissent offrir en gros le même niveau de services publics en matière de santé et d'éducation, par exemple, que les provinces plus nanties, sans appliquer des taux d'imposition excessivement élevés. Le projet de loi a été conçu conformément à l'accord qui a été conclu l'automne dernier entre le premier ministre et les premiers ministres des diverses provinces.

Je voudrais également reconnaître que nous ne voulons pas que la formule de péréquation soit manipulée de façon à profiter à certaines provinces aux dépens d'autres. Cela peut se produire. Il faut prendre garde à cela. Nous appuierions énergiquement un réexamen de la formule de péréquation elle-même.

En particulier, nous voulons reconnaître la nécessité de s'attaquer aux problèmes à long terme plus importants, comme cela nous a été promis. Les promesses ne semblent être que des paroles en l'air pour le gouvernement. On dirait qu'il peut promettre une chose et faire autre chose, ou encore ne pas tenir compte du tout d'un problème et même, dans certains cas, en nier l'existence et voter dans le sens contraire.

En fait, c'est ce que le gouvernement a fait au sujet de la nomination d'un conseiller en éthique. Il a dit qu'un conseiller en éthique serait nommé par le Parlement, qu'il rendrait compte au Parlement et conseillerait les ministres et le premier ministre en particulier sur les questions d'éthique. Qu'est-il arrivé? Nous avons cru le gouvernement sur parole.

Nous avons proposé à la Chambre une motion demandant que le conseiller en éthique soit nommé par le Parlement. En fait, nous avons pris les termes exacts tirés du livre des promesses. Devinez ce qui est arrivé. Chaque libéral présent à la Chambre a voté contre cette motion. Cela porte à douter de leur intégrité.

Une voix: Sauf pour ceux qui étaient absents.

M. Werner Schmidt: Ce n'est pas ce que j'ai dit. Mon collègue dit que les députés qui étaient absents n'ont pas voté contre cette motion. C'est vrai, mais cela n'a rien changé puisqu'ils n'étaient pas ici. Les seuls votes qui comptent sont ceux des députés présents. Leur intégrité est en doute d'une façon ou d'une autre. Tout d'abord, les députés devraient être ici pour voter parce que c'est pour cela qu'ils ont été élus. Deuxièmement, le gouvernement n'a pas fait ce qu'il avait promis de faire dans le livre rouge.

Le gouvernement va-t-il vraiment évaluer et réexaminer la formule de péréquation? Va-t-il vraiment être juste ou va-t-il la manipuler et changer la façon dont l'argent est distribué? Ce sont des questions très sérieuses qui, je crois, doivent être réglées de façon très rapide et efficace.

 

.1155 +-

Je vais m'arrêter ici, mais j'insiste sur le fait que nous appuyons les paiements de péréquation, que la formule de péréquation doit être réexaminée et que l'abolition du plafond n'est probablement pas la meilleure chose à faire à ce moment-ci.

Par conséquent, nous allons nous opposer à ce projet de loi, mais pas parce que nous sommes contre la péréquation. Nous sommes en faveur des paiements de péréquation. Nous voulons ces paiements, nous en avons besoin, et le Canada doit les appuyer.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Madame la Présidente, je suis ravie de pouvoir prendre ce matin la parole sur le projet de loi dont nous sommes saisis et qui vise à modifier la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces ou, plus exactement, de souligner l'insuffisance des modifications à la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces.

D'abord, je dois dire que j'ai eu l'impression que les deux députés de l'Alliance avaient trouvé leur chemin de Damas, à les entendre chanter les louanges de la péréquation et des paiements de transfert et reprocher au gouvernement fédéral d'avoir imposé unilatéralement, en 1995, des réductions tellement draconiennes que les Canadiens, et surtout ceux des provinces démunies, continuent aujourd'hui d'en payer le terrible prix.

Pourquoi dire qu'ils ont trouvé leur chemin de Damas? Personne à la Chambre n'a travaillé plus fort que le Parti réformiste réincarné en Alliance canadienne, pour essayer d'obtenir les réductions draconiennes mêmes que le gouvernement a imposées.

Cela étant dit, qu'on sache bien que mon parti et moi-même n'acceptons pas l'idée que le Parti libéral imposent automatiquement la politique mesquine et destructrice de l'Alliance. Et pourtant, c'est exactement ce qui se passe ces dernières années. Non seulement les provinces démunies, mais une majorité écrasante de Canadiens, quelles que soient leurs convictions politiques, n'acceptent pas cela.

J'ai négligé de dire au départ que j'avais l'intention de partager le temps mis à ma disposition. Je demande à la Chambre son consentement unanime pour que je puisse partager le temps mis à ma disposition avec le député de Regina—Qu'Appelle.

Le président suppléant (Mme Bakopanos): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Mme Alexa McDonough: J'apprécie l'esprit coopératif des députés. J'ai été tellement estomaquée et consternée par l'hypocrisie de certaines observations que j'ai oublié, d'entrée de jeu, de signaler ce point. Je remercie les députés de se montrer coopératifs.

Je dois tout d'abord dire qu'une formule équitable de péréquation est extrêmement importante pour les électeurs de la circonscription que je représente, la population de Halifax. C'est aussi extrêmement important pour les habitants des quatre provinces de l'Atlantique et pour ceux du Québec, de la Saskatchewan et du Manitoba.

J'irai même plus loin. À mon avis, ce ne sont pas seulement ceux qui sont désavantagés par l'aide artificielle que constituent les paiements de péréquation versés par le gouvernement fédéral qui se préoccupent de cette question. Je crois qu'être Canadien, c'est souscrire à une formule de péréquation équitable qui définit, non seulement en paroles, mais concrètement la réalité des Canadiens qui, où qu'ils vivent, doivent pouvoir bénéficier d'un niveau de services assez comparable.

La péréquation vise à éviter que nous voyions s'élargir le fossé entre les nantis et les défavorisés, qu'il s'agisse de particuliers ou de régions de notre pays. Si ce fossé très alarmant et très éprouvant pour les gens, les familles, les collectivités et les régions s'accroît, c'est parce que le gouvernement a fermé les yeux sur ce principe fondamentalement important.

 

.1200 +-

Pour commencer, je tiens à préciser tout de suite la position du Nouveau Parti démocratique. Plusieurs néo-démocrates l'ont défendue à la Chambre, mais nul ne l'a fait aussi bien que mon collègue, le porte-parole de notre parti en matière de finances, le député de Regina—Qu'Appelle. Il a toujours été un fidèle et invétéré défenseur d'une formule de péréquation équitable et défend, depuis 30 ans, les intérêts des habitants de sa circonscription et des Canadiens qui croient au principe d'équité que représente une péréquation bien administrée.

Ce qui nous inquiète dans ce projet de loi et dans les modifications qu'on y propose, c'est que le plafond artificiel des paiements de péréquation va être rétabli durant l'exercice en cours. Nous considérons, tout comme les Canadiens équitables, qu'il faut éliminer le plafond des paiements de péréquation.

Je pense qu'il est bon de rappeler au gouvernement, chaque fois que l'occasion s'en présente, que le Canada a constitutionnellement l'obligation de s'assurer que les transferts aux provinces sont suffisamment élevés pour permettre à chacune d'elles de servir l'intérêt public et de veiller à satisfaire aux besoins de ses habitants. Ce sont là, pour des raisons d'ordre historique, juridique et moral, les principaux objectifs que doit atteindre le programme de péréquation.

Dans sa forme actuelle, le programme de péréquation n'atteint pas ces objectifs. J'ai écouté le secrétaire parlementaire du ministre des Finances dire que le projet de loi vise à garantir la réalisation de l'objectif d'un niveau et d'une qualité de services à peu près comparables pour tous les Canadiens. Si les paiements de péréquation sont de nouveau plafonnés, il est tout à fait clair que l'objectif dont il a parlé ne peut tout simplement pas être atteint. C'est impossible. Le gouvernement a fait la sourde oreille à ceux qui demadaient qu'un plafond ne soit pas imposé.

C'est difficile d'imaginer que le secrétaire parlementaire, le ministre des Finances et le premier ministre ne comprennent absolument pas que l'objectif ne peut pas être atteint. Je dirai même qu'ils ne veulent pas que les dispositions qu'on trouve dans les modifications proposées à la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, dont nous sommes saisis, respectent cette constitutionnelle et cet important principe.

Nous savons que le gouvernement libéral a totalement amputé les transferts fiscaux aux provinces, minant du même coup l'intérêt national et détruisant l'autorité morale dont a besoin un gouvernement libéral qui prétend croire au concept de la fourniture de services à peu près comparables à tous les citoyens du pays, quel que soit l'endroit où ils vivent et quelle que soit la situation financière de leur province.

Puis, le gouvernement se dit fort surpris, voire indigné, quand une province comme l'Alberta présente le projet de loi 11, quand une province comme l'Ontario dont le premier ministre a osé parler cette semaine de la poursuite de la privatisation des services de santé, de leur transformation en entreprise commerciale fondée sur la notion que l'on peut tirer profit des maladies et des accidents d'autrui.

 

.1205 +-

On ne soulignera jamais assez souvent la faiblesse fondamentale de la Loi sur les arrangements fiscaux. Le projet de loi C-18 vise à éliminer, pour l'exercice commençant le 1er avril 1999, le plafond qui s'appliquerait par ailleurs aux paiements de péréquation. Sauf qu'il réimpose ensuite ce plafond pour l'exercice 2000-2001.

Bien sûr, il convient de noter que les dix provinces sont d'accord avec cette mesure. Elles veulent toutes que le gouvernement supprime le plafond applicable aux paiements de péréquation. Même les provinces plus riches, qui sont les cotisants nets aux paiements de péréquation, sont d'accord pour dire que le fait d'imposer et de maintenir artificiellement cette limite sur les paiements de péréquation nuit au tissu de la nation et mine la qualité et la comparabilité des services offerts aux provinces pauvres.

La semaine dernière, au Comité des finances, les provinces de l'Atlantique et le Manitoba ont demandé avec beaucoup d'efficacité au gouvernement de relever le plafond à au moins 10,79 milliards de dollars s'il ne veut pas s'engager à le supprimer de façon permanente.

Cette semaine, les ministres des Finances de ces cinq provinces ont présenté avec beaucoup d'efficacité leurs arguments sur la question au Comité des finances. Cependant, le gouvernement, le ministre des Finances et son secrétaire parlementaire ont fait la sourde oreille devant les préoccupations exprimées par les ministres des Finances provinciaux et les gens qu'ils représentent.

Le ministre des Finances du Manitoba a très bien résumé le problème en disant qu'il fallait permettre au programme de péréquation d'accomplir son travail en supprimant le plafond ou, à tout le moins, en l'amenant au niveau qu'il avait atteint l'année où on l'avait éliminé, soit en 1999-2000. Cela offrirait un soutien grandement nécessaire aux provinces qui souffrent encore des compressions unilatérales massives imposées par le gouvernement dans les paiements de transfert.

Le gouvernement doit appliquer une norme fondée sur 10 provinces pour arriver à une formule de péréquation équilibrée et, plus important encore, pour obtenir les résultats que cette formule est censée donner. Le gouvernement fédéral a si radicalement réduit les montants du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, ce qui a entravé la capacité des provinces de financer adéquatement la santé et l'enseignement postsecondaire, que, lorsque Harris et Klein se sont lancés sur la voie de la privatisation, il n'était plus dans une position de force pour défendre la Loi canadienne sur la santé et, d'ailleurs, il ne semblait pas trop vouloir défendre cette loi.

Je ne crois pas qu'il soit cynique de laisser entendre que, en affaiblissant l'engagement en faveur de services comparables d'un bout à l'autre du Canada et en pratiquant des coupes sombres dans les paiements de transfert qui permettent aux provinces de financer les services de santé, l'éducation et les programmes sociaux essentiels, le gouvernement fédéral portait un coup fatal à la confiance que les Canadiens ont dans les services publics importants sur lesquels ils comptent.

J'affirme que le gouvernement fédéral doit rétablir immédiatement le niveau du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Le gouvernement fédéral a investi des miettes dans l'infrastructure et dans les transports, ce qui a retardé la remise à niveau essentielle des transports et des infrastructures dans toutes les régions du Canada.

 

.1210 +-

Le gouvernement fédéral a abandonné ses responsabilités constitutionnelles depuis beaucoup trop longtemps. Il doit s'engager sur tous les fronts à faire en sorte que les gouvernements provinciaux puissent atteindre les objectifs contenus dans notre Constitution afin que le Canada soit le pays que nous voulons qu'il soit, le genre de pays que nous étions en train de devenir et que les autres pays nous voyaient devenir.

Sans cela, nous laisserons pour compte les Canadiens qui ont besoin des services et qui en dépendent, et, en plus, nous porterons un coup fatal à l'idée que les Canadiens et les gens des autres pays se font du Canada.

Les décisions du gouvernement témoignent de son indifférence à l'endroit des besoins véritables des Canadiens. Ce n'est pas être trop dur envers le gouvernement que de le décrire comme étant arrogant et déphasé par rapport aux besoins véritables des Canadiens, plus particulièrement dans les provinces moins bien nanties.

Dans son discours du Trône, le gouvernement n'a proposé aucune solution au problème fondamental d'assurer au moins un semblant d'uniformité dans les services accessibles à tous les citoyens. À l'époque, j'ai demandé s'il reconnaissait l'existence du problème posé par une formule de péréquation injuste et ce qu'il entendait faire pour le régler. La formule empêche les gouvernements des provinces moins bien nanties de réaliser des progrès en raison d'une récupération excessive du produit des ressources provenant, par exemple, du développement extracôtier, qui pourrait maintenant fournir à la Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve la possibilité de ne plus compter parmi les provinces défavorisées.

À tous les égards, il semble que c'est le gouvernement, et non pas la population du Canada, qui a abandonné le rêve canadien. Lorsqu'un gouvernement cesse de rêver, lorsqu'un gouvernement abandonne quelque chose d'aussi fondamentalement important et change une formule de péréquation dans le but de restreindre artificiellement la capacité des gouvernements provinciaux de tenir leurs promesses, à ce moment-là il doit réellement s'interroger sur sa raison d'être.

La bataille que nous menons afin d'essayer de convaincre le gouvernement de croire à nouveau à cet important rêve fondamental comporte plusieurs éléments. Je sais ce que cela signifie pour les citoyens de Halifax que de vivre avec la décision cynique du gouvernement de supprimer le plafond de la formule de péréquation, puis de se raviser un an plus tard.

Je peux en parler en expliquant le point de vue des citoyens qui n'ont pas accès aux services de santé dont ils ont besoin, le point de vue des étudiants qui n'ont pas les moyens de poursuivre leurs études, ou qui doivent aujourd'hui s'endetter pour obtenir une formation postsecondaire. Très concrètement, le gouvernement risque deux fois plus en limitant artificiellement les paiements de péréquation et en revenant sur ses engagements concernant les paiements de transferts. Cette politique incite les Canadiens des provinces démunies à migrer vers les régions plus favorisées du pays.

 

.1215 +-

Nous ne voulons pas de cela au Canada et ce n'est pas le Canada dont les parlementaires voudraient.

Je prie instamment le gouvernement de tenir compte du fait que, ce qui lui semble être une question relativement sans importance dans le libellé de ce projet de loi concernant les arrangements fiscaux est en réalité une question fondamentale qui risque d'être lourde de conséquences si les paiements de péréquation sont artificiellement restreints par le maintien de ce plafond en 2001. Je demande au gouvernement de revenir sur sa décision et de reconnaître qu'il doit renoncer à ce plafonnement artificiel.

L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je veux également intervenir brièvement dans ce débat aujourd'hui.

J'estime que c'est un des principaux fondements du fédéralisme canadien. Nous avons des programmes financiers fédéraux-provinciaux qui remontent aux années 40 et 50. À l'époque de Pierre Trudeau, soit en 1968 ou 1969, il y a eu le ministère de l'Expansion économique régionale et l'accroissement des paiements de péréquation ainsi que leur intégration à la législation.

Le grand point tournant s'est produit en 1981, au moment du rapatriement de la Constitution canadienne. Il a été décidé de considérer les paiements de péréquation comme un des éléments de la Constitution. C'était extrêmement important parce que nous avons reconnu, au sein de notre fédération unique, d'ailleurs l'une des plus décentralisés au monde, qu'il fallait trouver le moyen d'équilibrer les conditions de vie des citoyens de toutes les régions du pays. Il fallait répartir la capacité financière pour assurer, d'une province à l'autre, des services comparables en matière de soins de santé, d'éducation et de programmes de soutien agricole.

Il y a de grandes iniquités entre les provinces et les régions du pays à cause de la Constitution et des ressources. Nous voyons également de grandes disparités. Il y a d'une part trois provinces, en l'occurrence l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique, qui historiquement ont été plus favorisées, et, d'autre part, sept provinces qui historiquement obtiennent des fonds grâce aux paiements de péréquation. Ma province, la Saskatchewan, est l'une de celles qui reçoivent généralement des paiements de péréquation. Toutefois, à quelques reprises, le niveau de croissance économique a été suffisamment élevé pour qu'elle ne touche pas de paiement de péréquation.

Je pense qu'un des objectifs de la Confédération est de soutenir des programmes comme la péréquation. Toutefois, le gouvernement a supprimé le plafond applicable aux paiements de péréquation, qui était de 10 milliards de dollars pour 1999-2000, et l'a haussé à près de 10,8 milliards. Coïncidence, cette mesure est intervenue avant la dernière campagne électorale. C'est toute une coïncidence. Le premier ministre a annoncé que le plafond serait supprimé, puis il a déclenché les élections. Il voulait remporter plus de sièges dans la région de l'Atlantique, au Manitoba et en Saskatchewan. Qu'a fait le gouvernement après les élections? Il a rétabli le plafond. Faute d'élections en vue, le plafond a été rétabli.

Les ministres des Finances du Manitoba et des quatre provinces de l'Atlantique ont dit au comité qu'ils étaient contre l'application d'un plafond ou qu'ils souhaitaient, à tout le moins, que le montant soit haussé de 10 milliards de dollars à 10,8 milliards.

Il est intéressant que le premier ministre se soit engagé à supprimer le plafond. Fait également intéressant, les ministres des Finances des dix provinces ont demandé que le plafond soit supprimé. Avec un surplus budgétaire prévu de 15 à 17 milliards de dollars pour l'exercice, nous avons maintenant la marge de manoeuvre voulue pour le faire. Le ministre doit faire une déclaration d'ici quelques semaines. Nous serons en mesure d'accroître les paiements de péréquation afin d'égaliser les conditions à la grandeur du pays.

En dépit de tout ce qui a été dit au Comité des finances, lorsque nous avons présenté des amendements il y a quelques jours, le secrétaire parlementaire n'a voulu en accepter aucun. Bien entendu, le comité ne peut pas adopter lui-même une motion de voies et moyens pour modifier la loi. Toutefois, le comité a proposé que le ministre dépose un amendement à la Chambre, à l'étape du rapport, afin de hausser le plafond de 10 milliards à 10,8 milliards. Le secrétaire parlementaire a rejeté cette proposition pourtant très modeste.

Ironie suprême, et je crois savoir que certains journaux de la région de l'Atlantique en ont fait état, mon collègue du Bloc québécois a proposé un amendement demandant au ministre d'envisager, un jour, la possibilité de relever le plafond. Toutefois, le secrétaire parlementaire a rejeté cette proposition qu'il jugeait trop radicale.

 

.1220 +-

Nous avons besoin d'une sérieuse réforme parlementaire. Les comités doivent être plus indépendants pour être en mesure de proposer des mesures avantageuses pour les Canadiens. Dans le cas que j'ai mentionné, les ministres des Finances des provinces de l'Atlantique et du Manitoba ont dit au comité que le plafond devrait disparaître ou que, à tout le moins, il devrait s'établir à 10,8 milliards de dollars, au lieu de 10 milliards par année.

Si les comités n'ont pas cette indépendance, les inégalités entre les régions nanties et les régions démunies augmenteront. Les inégalités dans les services de santé, l'enseignement et les programmes sociaux s'accroîtront. Pour ce qui est du fardeau fiscal, les inégalités augmenteront entre l'Alberta, par exemple, et le Nouveau-Brunswick et bien d'autres provinces.

En raison de la Constitution, l'Alberta a le bonheur et la chance de posséder d'importantes ressources pétrolières et gazières. En fait, cette situation posera un problème intéressant pour le fédéralisme fiscal, car, avec l'exploitation de ses sables bitumineux, l'Alberta possède plus de pétrole et de gaz que l'Arabie saoudite. Il sera intéressant de voir comment la situation évoluera au cours des prochaines années.

Les Pères de la Confédération n'avaient pas prévu l'existence de cette manne de gaz, de pétrole et de bien d'autres ressources. Les droits à ces ressources ont été confiés aux provinces. J'appuie le droit des provinces d'avoir compétence en matière de gaz et de pétrole, mais je crois aussi que le gouvernement fédéral a le droit fondamental d'appliquer un programme de péréquation qui répartit la richesse de façon à favoriser une meilleure égalité.

Voilà quelques-uns des problèmes que nous devrons affronter à l'avenir. Il sera très difficile de composer avec la richesse pétrolière faramineuse de l'Alberta, plus grande encore que celle de l'Arabie saoudite, car elle engendrera des inégalités flagrantes entre cette province et deux ou trois des provinces atlantiques, le Québec, la Saskatchewan et le Manitoba. On pourrait composer avec la situation en reprenant une idée lancée en 1981 dans le cadre des négociations constitutionnelles, celle de consacrer les paiements de péréquation dans la Constitution.

Cela forcerait le gouvernement fédéral à se montrer aussi généreux que le permettent nos capacités financières, pour assurer un traitement égal pour tous les Canadiens. Ainsi, aux quatre coins du pays, que ce soit à Corner Brook, à Terre-Neuve, ou à Calgary, en Alberta, l'éducation et des soins de santé décents seraient également accessibles à tous. Voilà la philosophie qui préside au régime de péréquation.

Je sais que les alliancistes reprochent au gouvernement de s'engager dans toutes sortes de programmes et qu'ils réclament des coupes massives. Le programme de compressions massives de l'Alliance a terrifié le pays et le Parti libéral. Il a terrifié le ministre des Finances, le premier ministre et a fait verdir d'effroi le secrétaire parlementaire.

En 1995, particulièrement, le gouvernement a sabré dans les dépenses comme aucun gouvernement conservateur ne l'avait fait dans l'histoire, même dans les années 1930 sous R. B. Bennett. De fait, ce comportement fait paraître mes amis conservateurs là-bas comme des socialistes effrénés comparativement à ceux d'en face.

Une voix: Nous le sommes.

L'hon. Lorne Nystrom: Mon ami conservateur de Terre-Neuve dit que c'est ce qu'ils sont. Comparativement aux libéraux, ils le sont certainement.

Des coupes massives ont été effectuées en 1995. Les libéraux y avaient été poussés par le Parti réformiste, qui était fondamentalement opposé à tout programme gouvernemental ou public visant à créer l'égalité des conditions sociales. L'ancien Parti réformiste, maintenant l'Alliance, défendait cette position et le gouvernement a repris son programme.

Le temps est venu de modifier le parcours. On doit maintenant s'attaquer au déficit humain, ce qui signifie qu'il faut plus de dépenses dans le domaine social ainsi qu'un traitement plus égal au chapitre des impôts. Nous pouvons le faire.

Des alliancistes voudraient nous faire croire que la péréquation veut dire que les recettes fiscales de l'Alberta sont directement remises aux habitants de Terre-Neuve. Il n'y a rien de plus faux. Les paiements de péréquation viennent du Trésor constitué par les impôts que le gouvernement fédéral lève partout au Canada et ils sont versés aux provinces pauvres afin de créer l'égalité des conditions sociales. Les alliancistes s'opposent encore à cela. Ils se moquent des principes d'égalité, de justice et d'équité. Ils veulent un système où les riches deviennent plus riches et les puissants, plus puissants.

L'Alliance préconise un taux d'imposition uniforme, idée qui a été rejetée par les républicains de Bush aux États-Unis. Les idées de ce genre servent les intérêts des riches, des nantis et des privilégiés. Il ne faut pas s'étonner de voir que l'Alliance est si peu populaire auprès des Canadiens de toutes les régions.

 

.1225 +-

Ces idées archaïques dignes de Fred Caillou n'ont pas leur place dans le monde moderne. Les Canadiens réclament l'égalité et la justice. Les députés de l'Alliance devraient retourner dans leurs cavernes. Leurs idées sont dépassées.

Il est temps de dire au gouvernement d'en face de ne pas s'en laisser imposer par l'opposition, de faire ce qu'ils doivent faire et de répondre aux demandes des ministres provinciaux des finances, y compris ceux de l'Alberta, de la Colombie-Britannique et de l'Ontario. Les ministres ont tous demandé une augmentation des paiements de péréquation. Ils ont tous affirmé que l'on devait faire disparaître le plafond ou refaire les calculs pour le faire passer de 10 à 10,8 milliards.

Le premier ministre du Canada l'a d'ailleurs affirmé avant la campagne électorale. Les quatre provinces de l'Atlantique, de même que le Manitoba et la Saskatchewan, sont venues à Ottawa pour le demander. Si nous ne le faisons pas, nous risquons de voir davantage d'inégalités, de plus grandes iniquités entre les régions et davantage de gens pauvres devant se résoudre à fréquenter les banques alimentaires.

Il me semble que si nous décidons de faire ce que nous avons à faire en tant que parlementaires, nous devrions voir à assurer des conditions égales pour le bien de tous, de sorte qu'un enfant du Nord, des Prairies, de l'Alberta, de Terre-Neuve ou du Québec ait exactement les mêmes chances qu'un enfant d'ailleurs au pays.

Je demanderais encore une fois au secrétaire parlementaire d'en face de parler à son gouvernement et de présenter à la Chambre une motion de voies et moyens en vue de modifier le projet de loi sur la péréquation dont nous sommes saisis, ou à tout le moins de s'assurer, dans le rapport financier qui sera présenté dans deux semaines et qui comportera un excédent budgétaire de 15 à 17 milliards de dollars, que l'on prévoira une augmentation des paiements de péréquation de façon à pouvoir traiter tous les Canadiens de façon juste et équitable, où qu'ils vivent.

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je puis facilement prendre le relais à partir des observations faites par l'orateur qui me précédait, car nous sommes d'accord sur beaucoup de points.

Je suis absolument d'accord avec ce qu'a dit le député en parlant du fédéralisme et du trait constitutif essentiel du Canada: le partage, c'est-à-dire le partage de notre richesse et des avantages dont nous bénéficions.

Il arrive de temps à autres que des provinces ne réussissent pas aussi bien que les autres. Certaines provinces qui sont très prospères aujourd'hui ne l'étaient pas autant autrefois. Je songe en particulier à l'Alberta. Jusqu'à ce qu'on y découvre du pétrole, l'Alberta était à peu près aussi pauvre que les provinces de l'Atlantique de nos jours.

Je veux revenir plus précisément au sujet de sorte que les gens qui suivent nos délibérations sachent de quoi il est question aujourd'hui. Nous parlons de la formule de péréquation et de la volonté du gouvernement d'y imposer un plafond. La péréquation constitue un transfert inconditionnel de fonds du gouvernement fédéral aux provinces admissibles, et ce paiement est établi d'après une formule tenant compte de nombreux indicateurs économiques, démographiques et budgétaires.

Monsieur le Président, avant d'aller plus loin, je préviens que je partagerai mon temps de parole avec le député de St. John's-Ouest.

La formule de péréquation a été conçue pour suppléer à l'incapacité d'une province de tirer suffisamment de revenus de son économie. Les paiements de péréquation permettent aux provinces d'avoir suffisamment de revenus pour fournir des services publics de niveaux raisonnablement comparables à des taux d'imposition raisonnablement comparables. Il est très important de comprendre cela.

Il est évident que, pour maintenir les services de santé, d'éducation et tous les autres services qu'assurent les gouvernements, les provinces plus pauvres ne sont tout simplement pas en mesure de le faire à même leurs propres ressources. Cela se voir très bien dans ma province, le Nouveau-Brunswick, où les paiements de péréquation constituent la source de revenus la plus importante. Je crois ne pas me tromper en disant que cela vaut également pour l'Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse.

Quand le gouvernement fédéral élimine le plafond des paiements, ou plafonne les paiements, arbitrairement et sans consultation, cela crée un handicap pour ces provinces. En somme, le gouvernement manque à l'esprit de la Loi constitutionnelle de 1982, qui garantit les paiements de péréquation. Si les paiements sont plafonnés, ce sont les provinces pauvres qui sont désavantagées.

 

.1230 +-

M. Peter MacKay: Le Manitoba et la Saskatchewan.

M. Greg Thompson: Le Manitoba et la Saskatchewan, comme le député le député de Pictou—Antigonish—Guysborough le rappelle, bénéficient aussi du programme. Je vais me reporter à mes notes pour que tout soit clair. Sept provinces touchent actuellement des paiements de péréquation. Ce sont le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, le Québec, le Manitoba et la Saskatchewan.

Les paiements sont versés par le gouvernement fédéral et sont puisés dans les sources de recettes fédérales auxquelles tous contribuent. Les paiements viennent donc des recettes générales.

Avant que mon collègue de Terre-Neuve ne prenne la parole pour faire passer son message de couleur régionale—je me trompe peut-être, mais c'est ce que je crois—, je vais refaire l'historique de la péréquation au Canada.

Une pratique établie depuis longtemps au Canada veut que nous partagions la richesse. Je me reporte à un article de Kenneth Norrie, Richard Simeon et Mark Krasnick intitulé «Federalism and the Economic Union in Canada». Il résume les grandes étapes du programme.

La péréquation remonte à 1867, l'année même où le Canada est né, et à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Il s'agissait alors de ce qu'on appelait les subventions législatives. Elles étaient des paiements versés aux provinces contre la cession des impôts indirects à Ottawa. Une formule avait déjà été établie pour compenser la cession des impôts directs. En 1940, ce programme a été renouvelé sous le titre de subventions d'après la norme nationale, conformément aux recommandations du rapport Rowell-Sirois. Ces subventions étaient versées selon les besoins financiers.

Puis, en 1957, on a revu la péréquation encore une fois. Le premier régime officiel de péréquation a été établi en 1957. Il s'inscrivait alors dans le cadre des arrangements fiscaux de 1957 à 1962. Le gouvernement fédéral de l'époque a accepté d'aligner les rendements par habitant de trois taxes standard sur le rendement moyen dans les deux provinces les plus riches, ce qui portait tout le monde à un niveau plus élevé, à cause de la prospérité dans certaines provinces mieux nanties.

En 1958, on a examiné le programme à nouveau et on a augmenté la péréquation pour l'impôt sur le revenu des particuliers. Il s'agissait, encore une fois, d'un échange. La part provinciale de l'impôt sur le revenu des particuliers versé aux provinces a grimpé de 10 p. 100 à 13 p. 100. Cet élément a été inclus dans la formule de péréquation.

Entre 1958 et 1961, le programme a été réexaminé à nouveau. Le gouvernement a instauré les subventions de redressement des provinces de l'Atlantique et a promulgué la Loi relative au supplément d'aide financière à Terre-Neuve, une loi du Parlement. Les subventions supplémentaires inconditionnelles accordées aux provinces de l'Atlantique ont été justifiées par la piètre capacité fiscale de ces provinces; autrement dit, leurs économies étaient faibles.

En 1962, on a encore une fois revu ce qui fut nommé l'accord sur les arrangements fiscaux de 1962-1967. La part de l'impôt sur le revenu des particuliers a été portée à 16 p. 100 conformément aux arrangements fiscaux et on a ajouté la règle du 50 p. 100 de la moyenne sur trois ans des recettes et taxes provinciales provenant des ressources naturelles. La norme de péréquation a encore été alignée sur la moyenne nationale.

De 1962 à 1967, on a procédé à un autre examen du programme. Les provinces ont gagné une part accrue des impôts sur le revenu des particuliers. En 1964-1965, la loi sur les ressources naturelles a été modifiée. Puis le centenaire est arrivé et le gouvernement fédéral a instauré la formule du régime fiscal représentatif pour la péréquation. En 1972, la même chose s'est produite et le programme a été prolongé. Trois nouvelles sources de revenu fiscal ont porté le total, à l'époque, à 19 sources de revenu fiscal. Les revenus de ces trois nouvelles sources, soit les taxes afférentes aux pistes de course, les primes d'assurance-maladie et les primes d'assurance-hospitalisation, faisaient auparavant partie des revenus divers sujets à péréquation. Des changements ont été apportés à cet égard.

 

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En 1973-1974, des dispositions visant les taxes scolaires ont été adoptées. En 1974-1975, les recettes tirées de l'énergie ont été révisées. En 1977, les dispositions de la Loi sur les arrangements fiscaux concernant la péréquation ont été adoptées par le parlement. En 1981, le projet de loi C-24 prévoyait deux mesures: le retrait de la catégorie correspondant à la vente de concessions publiques et la disposition spéciale relative au revenu des particuliers rendant inadmissible à la péréquation toute province où le revenu des particuliers par habitant dépassait la moyenne nationale au cours des deux années précédentes.

Comme nous pouvons le constater, les divers gouvernements libéraux et conservateurs, de même que les provinces, ont multiplié les mesures devant l'importance que prenait la péréquation pour la stabilité de notre pays.

En 1982, une nouvelle source de revenu fiscal a été créée. Aux termes des arrangements fiscaux de 1982-1987, la nouvelle norme de cinq provinces représentatives a été établie et s'appliquait désormais au programme de péréquation.

Comme il ne me reste qu'une minute, je conclu en disant que les Canadiens n'oublieront jamais le 17 avril 1982, jour où la nouvelle Loi constitutionnelle a été adoptée. Les provinces tout comme le premier ministre ont signé la loi, qui renfermait une disposition par laquelle le programme de péréquation était consacré dans la nouvelle Constitution du Canada.

De tout temps, la société canadienne a cherché à distribuer la richesse. La position et l'attitude du gouvernement actuel sont des plus mesquines, à mon avis. J'ai hâte d'entendre ce que le député de St. John's-Ouest, qui poursuivra le débat, aura à dire à ce sujet.

L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Madame la Présidente, mon collègue, le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest parle de l'Alberta et cite l'étude de Ken Norrie sur le fédéralisme économique.

Je tiens à assurer au député que nous, Albertains, savons toute la chance que nous avons à l'heure actuelle et nous voulons vraiment partager notre prospérité avec les Canadiens de la Saskatchewan, du Nouveau-Brunswick et d'ailleurs. Que faut-il faire, selon le député? Comment encourager les chômeurs de sa province à venir en Alberta? Comme le député ne l'ignore sûrement pas, nous manquons cruellement de travailleurs spécialisés en Alberta et nous avons besoin, notamment, qu'on vienne nous aider à exploiter les sables bitumineux.

A-t-il aussi quelque chose à dire au sujet de ce qu'un pays de compassion et de partage devrait faire lorsqu'une province a aujourd'hui des surplus élevés, comme tous les députés le savent sans doute?

M. John Duncan: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. J'ai besoin d'éclaircissements.

Après que le député de Regina—Qu'Appelle eut terminé son intervention, il n'y a pas eu, à ma connaissance, d'invitation à poser des questions ni à présenter des observations. Le débat a immédiatement repris et je n'ai donc pas pu prendre la parole. Ai-je raison de croire qu'il y a une différence entre l'intervenant actuel et le précédent pour ce qui est des questions et des observations?

Le président suppléant (M. Bélair): Comme vous le savez, nous avons entrepris la troisième lecture de ce projet de loi. Les trois premiers intervenants ont droit à 40 minutes chacun, sans question ni observation. Dans ce cas-ci, le Nouveau Parti démocratique a demandé le consentement unanime pour répartir le temps mis à sa disposition entre deux intervenants, à raison de 20 minutes par intervenant. Voilà pourquoi il n'y a pas eu de question ni d'observation.

Toutefois, pour ce qui est de l'allocution du premier intervenant, soit le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, il y aura soit une période de questions et d'observations de 10 minutes, soit deux périodes de questions et d'observations de 5 minutes chacune si les députés veulent bien se partager le temps mis à leur disposition.

 

.1240 +-

M. Greg Thompson: Monsieur le Président, je remercie le ministre de sa question concernant l'Alberta, le reste du Canada et ma province d'origine, le Nouveau-Brunswick. Il y a effectivement beaucoup de jeunes Canadiens qui quittent les provinces les plus pauvres du Canada pour chercher du travail ailleurs. Nous apprécions cette mobilité, mais de toute évidence, cela crée un problème dans certaines de nos provinces. Nous parlons de l'exode des cerveaux vers les États-Unis, mais le même phénomène se produit d'est en ouest au Canada. Nous comprenons la situation. Nous ne voulons pas que des barrières artificielles soient érigées, et je sais que le ministre ne le souhaite pas non plus.

Quant à l'idée de plafonner les paiements de péréquation, un des arguments que les premiers ministres des provinces ont fait valoir avec succès, selon moi, c'est que nous faisons de notre mieux, que nous progressons et que nous voulons la stabilité que confèrent les paiements de péréquation pour pouvoir continuer à progresser, à mettre en place l'infrastructure qui est nécessaire et à bâtir chez nous une économie qui permettra à nos jeunes de ne pas s'exiler.

Au bout du compte, le gouvernement ne peut pas donner quelque chose d'une main et le reprendre de l'autre. Par exemple, il y a un lien entre la formule de péréquation et le TCSPS, les sommes que le gouvernement fédéral transfère aux provinces au titre de la santé et des programmes sociaux. Lorsque le gouvernement prend de l'argent de ce secteur et qu'il prétend investir ailleurs, rien ne se produit. On peut dire à juste titre que l'on ne progresse vraiment pas. Donner d'une main et reprendre de l'autre serait une analogie acceptable en l'occurrence.

En vérité, les gouvernements ne devraient pas faire cela, parce qu'ils doivent prendre en considération l'ensemble de la situation. Afin de mettre en place de bons systèmes d'enseignement et de santé et de solidifier son économie, le Nouveau-Brunswick a besoin d'un petit coup de pouce au départ.

Le Nouveau-Brunswick aura connu une assez bonne croissance économique. Les statistiques venant du Canada atlantique sont très intéressantes parce que nous avons bâti sur nos succès et que nous entendons continuer sur cette lancée. Nous ne voulons pas être pénalisés pour nos succès, car c'est bien notre crainte de nous voir punis pour avoir réussi.

Le gouvernement fédéral demeure très important pour nous, et il doit prendre l'initiative. Nous ne voulons pas qu'il pénalise qui que ce soit au pays qui a réussi, que ce soit en aval en augmentant l'impôt des contribuables, ou ne amont en diminuant les paiements de péréquation. Nous voulons mettre nos forces à profit.

En vérité, nous aimerions avoir une société où les jeunes Canadiens n'auraient pas à quitter leur foyer pour aller chercher du travail ailleurs, que ce soit aux États-Unis ou dans une autre partie du Canada. Ce serait le monde parfait. Nous ne verrons probablement jamais cela, mais ne punissons pas les provinces plus pauvres pour les succès qu'elles remportent.

Le gouvernement fédéral a connu sa large part de succès au plan économique au cours des quelques dernières années. Il doit en faire profiter tout le pays, parce que chaque Canadien contribue aux recettes générales, et c'est cet argent qui sert à aider les provinces défavorisées.

M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest de partager son temps de parole avoir moi.

Je l'ai écouté expliquer comment nous en sommes arrivés à l'actuel régime de péréquation. J'ai écouté le chef du NPD et le député de Regina—Qu'Appelle. Je dois dire que plus j'en entendais sur le processus de péréquation, plus je me rendais compte que nous convenons tous que le régime actuel pour venir en aide aux provinces défavorisées—et j'utilise cet adjectif au sens très large—ne fonctionne pas. Nous sommes tous d'accord pour dire qu'il y a de meilleurs moyens pour le faire fonctionner. Nombre d'entre nous recommandent d'adopter de meilleurs moyens.

Il faut alors nous demander ceci. Si la plupart des parlementaires savent ce qui se produit d'un bout à l'autre du pays, si nous connaissons les réalités budgétaires des provinces riches et des provinces pauvres, si nous comprenons le partage, le régime de péréquation, les bons et les mauvais côtés, pourquoi ne faisons-nous rien de constructif à cet égard? Les députés de ce côté-ci ne peuvent que souligner et recommander des choses. Ce sont les gens d'en face qui peuvent faire quelque chose, et on peut dire qu'ils n'ont pas fait grand-chose.

 

.1245 +-

Le projet de loi C-18, qui enlève le plafonnement des paiements de transfert pour un an, est un pas dans la bonne direction parce que c'est ce qu'ont demandé les diverses provinces. Celles-ci ont aussi ont demandé que le plafond soit complètement enlevé, ce que je recommande, mais le déplafonnement n'est pas une panacée. Seule une réforme en profondeur de la péréquation nous permettra de régler tous les problèmes.

Le mot péréquation est trompeur. Quand on l'entend, on pense au vieux syndrome Robin des Bois: nous prenons aux riches, l'Alberta et l'Ontario, pour donner aux pauvres, et tous deviennent égaux. Si c'était le cas, quel merveilleux pays nous aurions. Cependant, ce n'est pas le cas. Tout ce que nous faisons, c'est prendre une somme dérisoire et la partager également selon la situation de chacun.

Depuis des années, nos concitoyens du reste du Canada veillent sur Terre-Neuve et, dans une certaine mesure, ils la voient comme une province pauvre qui n'a absolument rien à offrir. Ceux d'entre vous qui sont des politiciens expérimentés, qui ont voyagé et qui ont lu et se sont informés sur toutes les provinces du Canada savent que ce n'est pas le cas.

Je doute qu'il y ait une seule province au Canada aussi riche en ressources que Terre-Neuve. Si nous faisons une répartition par habitant de ses ressources, nous constaterions que Terre-Neuve, avec une modeste population d'un peu plus d'un demi-million d'habitants, pourrait être bien être la province la plus riche du Canada.

Le secrétaire parlementaire, qui est de l'Alberta, a demandé à mon collègue de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest si les habitants de sa province n'auraient pas intérêt à déménager dans la riche Alberta, où ils pourraient trouver des emplois. Je dirai au secrétaire parlementaire que beaucoup de Terre-Neuviens sont allés en Alberta et ont beaucoup contribué à la croissance de cette magnifique province. L'Alberta et Terre-Neuve ont été très près l'une de l'autre pendant des années. J'ai eu le privilège de servir au sein du gouvernement de Terre-Neuve au milieu des années 1980, lorsque M. Lougheed était premier ministre de l'Alberta. Il y avait des liens exceptionnellement forts entre nos deux provinces et ces liens tiennent toujours.

Ces derniers mois, le premier ministre Hamm, de la Nouvelle-Écosse, a porté le flambeau pour attirer l'attention des Canadiens sur le problème de la récupération des paiements de péréquation. Il est intéressant de voir qu'il jouit maintenant de l'appui d'autres premiers ministres qui ne sont pas aussi directement touchés, ainsi que du nouveau chef de l'opposition à Terre-Neuve, M. Williams.

Lorsque le premier ministre Hamm et le chef de l'opposition, M. Williams, ont décidé de sensibiliser tout le pays à leur situation, les Albertains ont commencé à comprendre qu'ils ne faisaient pas que réclamer plus d'argent de l'Alberta sans rien donner en retour. Lorsqu'ils ont vu ce qui se passait vraiment, les Albertains, y compris le premier ministre Klein, l'ancien premier ministre Lougheed, l'université de l'Alberta, le Calgary Herald, et je pourrais en nommer encore bien d'autres, ont exprimé leur appui dans leurs remarques, leurs discours, leurs éditoriaux. Ils ont dit que ce que ces gens demandaient était juste et que ce n'était pas vraiment quelque chose que les Albertains n'avaient pas eu dans le passé.

 

.1250 +-

J'ai parlé de Terre-Neuve et de ses richesses. En plus de nos forêts, de notre potentiel agricole, de notre secteur de la petite entreprise et de notre secteur de la technologie de l'information qui connaissent une croissance rapide, nous sommes parmi les endroits qui offrent le plus de possibilités sur le plan touristique dans le monde entier. Nous sommes l'une des dernières frontières au Canada, comme bien des gens commencent à le voir. Nous sommes limités seulement par l'accès, encore une fois à cause du traitement injuste que nous recevons du gouvernement central, et je parle du genre de système de traversiers que nous avons, d'un transporteur aérien en situation de monopole, et ainsi de suite. À part cela, nous sommes certainement la dernière frontière à part le Grand Nord.

Nous avons aussi d'importantes ressources. Les gens doivent se rappeler que nous avons apporté au Canada la pêche. Nous avons apporté les Grands Bancs de Terre-Neuve et tous les secteurs de pêche le long de la côte de notre province à l'intérieur de la limite des 200 milles. Pendant des années, le Canada s'est servi du poisson de Terre-Neuve comme monnaie d'échange pour conclure des ventes de blé et d'autres ventes à la Russie, à la Chine et à l'Europe. Tout le monde a pu puiser dans nos ressources, notamment les Espagnols, les Portugais et les Russes. Nos lieux de pêche ont été pillés par des pays auxquels on a accordé des contingents en contrepartie d'ententes visant à leur expédier d'autres ressources canadiennes.

En bout de piste, c'est Terre-Neuve qui a écopé. Notre énergie hydraulique, en amont du fleuve Churchill, a été mise en valeur dans le cadre d'une entente avec le Québec. Terre-Neuve touche environ 10 millions de dollars par année tandis que le Québec reçoit plus près de un milliard de dollars en redevances venant de notre énergie hydraulique. Je ne blâme pas le Québec. C'est une entente sanctionnée par le gouvernement fédéral, mais sans aucune aide de ce dernier, qui a permis l'établissement d'un corridor de transmission jusqu'aux marchés des États-Unis, ce qui a été fait pour le transport du pétrole et du gaz de l'Alberta dans le reste du pays.

Terre-Neuve est très riche en minéraux, particulièrement si l'on tient compte de l'importante découverte de Voisey's Bay. Il n'y a pas de mise en valeur pour plusieurs raisons, la principale étant que les gens veulent transporter la ressource ailleurs pour créer des emplois.

On procède présentement à la mise en valeur de notre pétrole et de notre gaz et, tout comme l'Alberta a connu la croissance et la prospérité grâce à son pétrole, Terre-Neuve fera un jour de même. Lorsque l'Alberta connaîtra un ralentissement économique, il se peut que Terre-Neuve puisse compenser et lui venir en aide à son tour.

La Confédération est censée être une affaire de partage. Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse et d'autres provinces ne tendent pas la main en disant «la charité, s'il vous plaît». Elles demandent une chance. Elles disent qu'elles possèdent les ressources voulues pour devenir des provinces nanties mais qu'elles doivent avoir la chance de mettre ces ressources en valeur et de conserver les redevances jusqu'à ce qu'elles puissent créer l'infrastructure qui leur permettra de devenir des provinces nanties.

Si le gouvernement veut assurer l'équilibre à l'échelle du pays, il devrait commencer par faire les choses comme il faut. Il devrait essayer d'être équitable afin qu'un jour chaque province du pays soit égale.

M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je sais que le député de St. John's-Ouest parle au nom de beaucoup de Terre-Neuviens qui soulèvent la question de la péréquation. J'aimerais donner quelques chiffres.

Le gouvernement reconnaît que la péréquation est un programme très important. Il a pour objet d'aider les provinces que l'on dit pauvres à assurer un niveau à peu près équivalent de services et de programmes à leurs habitants.

En 2001-2002, la province de Terre-Neuve et du Labrador recevra presque 1,6 milliard de dollars de la péréquation. Cela inclut le TCSPS et la péréquation. Cette somme représentera environ 40 p. 100 des recettes prévues de Terre-Neuve et du Labrador. On s'attend à ce qu'elle s'élève à environ 2 930 $ par personne, ce qui est plus de deux fois la moyenne nationale et plus que pour n'importe quelle autre province.

Si on regarde ce montant par habitant, qui est deux fois la moyenne nationale, intuitivement on parvient à la conclusion que c'est comme ça que c'est censé fonctionner. Selon cette formule, la province de Terre-Neuve et du Labrador recevra par habitant deux fois plus que la moyenne nationale.

 

.1255 +-

Le député pense-t-il que cela ne suffit pas pour que la province de Terre-Neuve et du Labrador assure la même qualité de services et de programmes à ses habitants?

M. Loyola Hearn: Monsieur le Président, je trouve que la question est insultante. Le secrétaire parlementaire semble demander si ça ne nous suffit pas de recevoir de l'aide sociale et plus d'argent que quiconque. Ce n'est pas ça que nous voulons.

Terre-Neuve reçoit 1,6 milliard de dollars. Uniquement grâce à nos ressources hydroélectriques, le Québec reçoit un milliard de dollars, sans parler du pétrole, du gaz naturel et des ressources minières. Nous recevons bien moins que notre contribution.

Nous devrions recevoir notre juste part de redevances. Nous ne réclamons pas la charité. C'est ça qui ne va pas. Les députés d'en face voudraient que nous prenions notre chèque d'aide sociale et que nous disions merci. Ce n'est pas ça que nous voulons. Nous voulons pouvoir contribuer. Nous avons les outils, les ressources et l'intelligence nécessaires pour le faire. Tout ce que nous demandons au gouvernement c'est de nous laisser faire.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je voudrais poser deux questions au député de St. John's-Ouest. Je le félicite également d'avoir reconnu que c'était le premier ministre de la Nouvelle-Écosse qui ne partage pas mon allégeance politique, mais la sienne, qui a été le fer de lance de la lutte pour obtenir une formule de péréquation équitable. Notre parti a été très heureux de collaborer à cet effort.

Le député pourrait-il nous parler du rôle et de la position de l'ancien premier ministre de sa province, Terre-Neuve, concernant la formule de péréquation? Je rappelle à tous les députés que lorsque ce dernier a décidé de se présenter aux dernières élections fédérales, il s'est enroulé dans le drapeau de l'unité et a lancé toutes sortes de belles paroles sur l'égalité des chances; il a dit notamment que l'une des raisons pour laquelle il était candidat, c'est qu'il voulait obtenir des changements à la formule de péréquation et la suppression du plafond.

Le député de St. John's-Ouest a-t-il suivi ce que l'actuel ministre de l'Industrie a fait pour essayer de persuader le gouvernement de supprimer le plafond artificiel sur les paiements de péréquation?

M. Loyola Hearn: Monsieur le Président, le premier ministre Hamm a certes été le premier à entreprendre la bataille dans laquelle d'autres ont maintenant décidé de se lancer. Je suppose que la députée sait aussi bien que moi la réponse à sa question. Le ministre de l'Industrie a fait très peu que ce soit avant ou après son retour à Ottawa.

M. Roy Cullen: Que faites-vous des 700 millions de dollars?

M. Loyola Hearn: Cette somme de 700 millions de dollars a été annoncée à cinq reprises. C'était toujours le même argent. Un de ces jours, je vais analyser pour le député les avantages offerts à notre région, et cela va le placer encore plus dans l'embarras.

Le ministre de l'Industrie a passé beaucoup de temps ici, à Ottawa, et il n'a rien apporté à Terre-Neuve en tant que premier ministre de la province. La seule fois où il a parlé du dossier de la péréquation, c'est durant la campagne électorale alors qu'il disait vouloir sauver le Canada atlantique. Il a été l'un des rares libéraux à être élus, parce qu'il a fait campagne sur un nouveau programme de péréquation. Il n'a pas tenu parole et cela ne surprend aucun de nous.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je compte partager mon temps de parole avec l'excellent et dévoué député d'Île de Vancouver-Nord. J'aurais pu lui appliquer un plus grand nombre de qualificatifs, mais je ne voulais pas que cela lui monte à la tête. Je suis fier de prendre la parole à la Chambre au sujet du projet de loi C-18, une initiative très importante, mais aussi d'aborder à ce stade la grande question des paiements de péréquation et de leur utilité.

Je ne puis résister à la tentation de philosopher quelque peu à ce sujet. Cet élément qui fonde notre société, les Canadiens y croient fermement. Ils croient en la communauté et dans le partage de leurs richesses avec les moins fortunés. Les libéraux ont joué là-dessus en essayant de faire gober aux Canadiens que ce parti est le seul à se soucier de leur sort. Les libéraux sont certainement experts dans un certain domaine, celui de saigner à blanc les Canadiens avec l'impôt, et de décider de leur propre chef de l'utilisation des deniers publics.

 

.1300 +-

Pas plus tard qu'hier, sans que la Chambre en ait débattu ou ait donné son aval, le premier ministre a affiché ses couleurs lorsqu'il a annoncé à Toronto la mise en place d'un programme d'aide à la culture, au coût de 500 millions de dollars. Je n'y comprends rien, car le gouvernement a indiqué qu'il ne relèverait pas le plafond des paiements de péréquation pour aider les provinces à se pourvoir en hôpitaux, en établissements d'enseignement, ainsi de suite. Le gouvernement est disposé à nous donner 500 millions de dollars, mais seulement dans le but de confirmer sa propre interprétation de la culture canadienne.

C'est une vision étroite du fait canadien et de la communauté canadienne. À franchement parler, les cultures canadiennes sont nombreuses et variées. Elles sont, dans la plupart des cas, parfaitement capables de se représenter elles-mêmes et de s'épanouir sans l'aide de subventions gouvernementales.

Ma circonscription compte une nombreuse communauté ukrainienne qui fait des merveilles pour promouvoir sa culture et préserver sa langue. Il y a quelque temps, en fait je crois que c'était il y a un peu plus d'un an, quoiqu'à mon âge on perd un peu la notion du temps, j'ai eu une conversation avec plusieurs membres de la communauté ukrainienne. Ils m'ont demandé d'appuyer l'octroi de subventions plus généreuses de la part du gouvernement fédéral.

J'ai engagé la discussion et je leur ai demandé: «D'où croyez-vous que vient l'argent?» Nous en avons discuté un peu. Je leur ai dit qu'il faudrait que nous soyons moins accablés d'impôt et que nous n'ayons pas à compter avec une énorme bureaucratie qui envoie notre argent à Ottawa, où les fonctionnaires ne distribuent pas les fonds là où ils devraient l'être, alors que certains groupes choisis par le premier ministre en bénéficient—je crois savoir qu'il a beaucoup d'influence au sein du Cabinet—et que si nous ne faisons pas partie de ces groupes, nous ne recevons rien.

Je leur ai expliqué que nous pourrions faire beaucoup mieux au Canada si on réduisait les impôts, de sorte que toutes les cultures pourraient financer les écoles, aussi bien ukrainiennes qu'allemandes ou autres, mais que cela nous est actuellement interdit en raison du programme officiel du gouvernement, en vertu duquel ce dernier retient la moitié des revenus des particuliers et redistribue l'argent à sa guise.

Je ne voudrais pas limiter ma définition de la communauté à la ville près de laquelle je vis ou à ma seule circonscription. C'est une magnifique circonscription. Monsieur le Président, je vous invite à y venir. Nous avons un parc national, le parc d'Elk Island. Il porte le nom de ma circonscription. C'est un endroit magnifique à visiter. C'est un endroit remarquable. Je ne voudrais pas non plus limiter ma définition de la communauté à ma seule province.

J'ai dit plus tôt aujourd'hui que depuis un an environ la situation économique en Alberta est très bonne grâce aux revenus provenant de l'énergie. Je me souviens qu'il y a huit ans ce n'était pas le cas et que les Albertains éprouvaient probablement autant que les autres Canadiens de la difficulté à financer leur éducation et leur santé. Nous avions d'énormes défis à relever afin de rationaliser le système de soins de santé. Cela est en partie attribuable au fait que le gouvernement fédéral est revenu sur la promesse qu'il avait faite de payer la moitié des frais relatifs aux soins de santé fournis dans les provinces et qu'il l'a progressivement abandonnée au fil des ans, au point de refiler entièrement la responsabilité aux provinces. Toutefois, il n'a jamais réduit les montants d'impôt qu'il avait exigés des provinces pour les ramener ici à Ottawa. Je considère donc que le gouvernement fédéral a agi de façon irresponsable au chapitre du financement de ces programmes.

 

.1305 +-

Je m'identifie à mon pays. Je suis venu ici à titre de Canadien. Je me tiens debout avec fierté lorsque nous chantons l'hymne national à la Chambre. Certains se rappelleront que j'ai suscité la controverse, sans le savoir et sans le vouloir, il y a quelques années lorsque j'ai insisté pour avoir le droit d'avoir un drapeau sur mon bureau à la Chambre des communes. En fin de compte, cela n'a pas été autorisé. On a considéré que ces drapeaux étaient des accessoires et je n'ai donc pas eu le droit d'en mettre un sur mon bureau. Tant pis.

Toutefois, je suis fier d'être Canadien et de m'identifier à mon pays. Je continue de dire que nous devrions considérer que tout le pays fait partie d'une seule communauté et fournir des soins de santé et des services d'éducation plus ou moins égaux, à des niveaux d'imposition similaires. Il est impossible qu'ils soient tout à fait égaux pour des raisons pratiques, mais ils devraient être aussi égaux que possible.

Encore une fois, je crois qu'il serait bon d'attirer l'attention des députés sur le fait que cela est inscrit dans notre constitution. Je vous renvoie à l'article 36 de la Loi constitutionnelle de 1982. Je vais lire cet article pour ceux qui ne le connaîtraient pas. Je cite:

Sous réserve des compétences législatives du Parlement et des législatures et de leur droit de les exercer, le Parlement et les législatures, ainsi que les gouvernements fédéral et provinciaux, s'engagent à:

a) promouvoir l'égalité des chances de tous les Canadiens dans la recherche de leur bien-être;

b) favoriser le développement économique pour réduire l'inégalité des chances;

c) fournir à tous les Canadiens, à un niveau de qualité acceptable, les services publics essentiels.

Le paragraphe 36(2) de notre Constitution stipule que:

Le Parlement et le gouvernement du Canada prennent l'engagement de principe de faire des paiements de péréquation propres à donner aux gouvernements provinciaux des revenus suffisants pour les mettre en mesure d'assurer les services publics à un niveau de qualité et de fiscalité sensiblement comparables.

Même si cette disposition a été introduite par un gouvernement libéral, je la trouve très bien. Cette disposition de notre Constitution ne me pose aucun problème. Il est de notre devoir de nous assurer que tous les Canadiens bénéficient de services de qualité comparables à des taux d'imposition comparables.

Toutefois, nous devons nous assurer qu'il n'y ait pas dédoublement. Nous devons nous assurer que ces services sont assurés de façon efficace et nous devons motiver les provinces et les habitants des provinces à améliorer leur sort, indépendamment de leur situation géographique. Notre pays ferait mieux de laisser tranquilles les personnes qui réussissent car elles réussiront encore mieux, feront croître notre économie et créeront des emplois et de ne pas laisser dans le dénuement celles qui sont dans le besoin.

J'aurais pu parler plus longtemps, mais le temps dont je disposais est écoulé. J'apprécie d'avoir eu la possibilité de faire part à la Chambre de mes remarques à l'égard de cette importante question.

[Français]

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, c'est avec fierté que le secrétaire parlementaire du ministre des Finances s'est levé, ce matin, à la Chambre, à l'occasion de son discours pour dire que le gouvernement fédéral a été généreux dans ses retours aux provinces. Il se sentait généreux, parce qu'il a donné au Québec, entre autres, 489 millions de dollars en péréquation.

 

.1310 +-

Si le gouvernement fédéral retourne à chacune des provinces cet argent en péréquation, c'est d'abord parce que ses revenus en matière de taxation en provenance des provinces, de chacune des provinces et des travailleurs, ont augmenté. Également, les dépenses du gouvernement ont diminué. Si le gouvernement se retrouve avec un déficit zéro aujourd'hui, ce n'est pas parce qu'il est bon administrateur, ce n'est pas parce que le ministre des Finances est meilleur que celui qui l'a précédé, c'est parce que le ministre des Finances a décidé de couper six milliards par année dans la caisse de l'assurance-emploi. Il a décidé de couper dans les paiements de transfert aux provinces en matière de santé et d'éducation. Le gouvernement fédéral a renoncé à toute responsabilité en matière d'entretien des aéroports et des quais.

Ce n'est pas un cadeau que le gouvernement nous fait, c'est de l'argent qui nous revient. Nous, dans un Québec souverain, allons gérer nos 33 milliards de dollars de taxes et impôts et nous dirons au gouvernement fédéral: «Gardez votre péréquation.» Je suis prêt à changer 33 milliards pour 489 millions.

[Traduction]

M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'attendais simplement la fin de l'interprétation. Je suis malheureusement unilingue et je dépends de ces gens merveilleux en cabine pour parler à ma place dans l'autre langue.

Je répondrai à la question de la façon suivante. Il n'y a en effet qu'un contribuable. Nous ployons sous le fardeau des impôts de tous les niveaux de gouvernement. Le gouvernement fédéral prend la plus grande part, suivi des provinces et des municipalités.

Je serais bien d'accord avec le député, mais je l'inviterais à faire montre d'un peu de réalisme. Les députés du Bloc sont voués à persuader leurs concitoyens de former un pays séparé et indépendant du Canada. Voilà ce à quoi ils sont engagés. Ils excellent à communiquer leur message, et je les admire pour cela. Leur parti a réussi à demeurer dans la même voie et déterminé à atteindre ses objectifs.

Je mettrais cependant en garde le député, ses collègues du Bloc et tous les citoyens du Québec pour qu'ils prennent soin de bien faire leurs calculs. En tant qu'habitants d'une province bénéficiaire du programme de péréquation, ils auraient beaucoup de mal à me démontrer, à l'aide de faits et de chiffres irréfutables, qu'ils ne sont pas des bénéficiaires nets du programme à l'heure actuelle. Ils paient sans doute leur part d'impôts, et je n'y trouve rien à redire. Cependant, ils sont de nets bénéficiaires à l'égard du programme de péréquation. Les chiffres sont très clairs.

À part cela, le député avait parfaitement raison dans ses observations.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce n'est pas la première fois que nous discutons de ce projet de loi, mais c'est la première fois que nous en discutions à l'occasion de sa troisième lecture.

Les interventions sur le projet de loi ont été transcrites et consignées dans cet endroit, mais les mesures ont surtout été rapportées dans le communiqué émis lors de la conférence des premiers ministres le 11 septembre 2000, annonçant le relèvement pour un an des paiements de péréquation. Bien sûr, cela s'est produit un mois avant le déclenchement des élections générales fédérales. Plus que tout autre, l'intervenant principal, le premier ministre, devait certainement avoir l'élection en tête au moment de cette annonce.

L'entente est survenue dans un cadre très politisé. Elle a été conclue pour une année. Il s'agit vraiment d'un projet de loi avec effet rétroactif. Il fait ressortir les talents extraordinaires du doreur d'image des libéraux.

J'ai en main le communiqué de presse du 15 mars émanant du cabinet du premier ministre. Ce communiqué, qui devait avoir pour thème principal le projet de loi déposé ce jour-là à la Chambre des communes, s'étend plus longuement sur le fait que l'économie ontarienne donne lieu à une hausse de 1,8 milliard de dollars de l'ensemble des paiements de transfert.

Au ministère des Finances et ailleurs, certains fonctionnaires reconnaissent que la question des transferts aux provinces fait l'objet d'une approche politique opportuniste. On essaie de camoufler la piste qui nous a menés là où nous sommes.

 

.1315 +-

La vraie raison qui fait que nous avons eu droit à cette annonce le 11 septembre, c'est que le gouvernement fédéral avait équilibré ses comptes. Entre 1993 et 1999, il a éliminé le déficit par trois moyens. Le premier a été de sabrer les transferts aux provinces, notamment le TCSPS, qui a été réduit de 33 p. 100. Il s'agit des fonds destinés à la santé, à l'éducation et à d'autres domaines importants qui sont des secteurs prioritaires de dépense pour les Canadiens. Le deuxième moyen a été de sabrer le budget du ministère de la Défense nationale. Le troisième a été de réduire tous les autres programmes de 3 p. 100 en moyenne.

Nous pouvons constater tous les dommages que cela a causés, car les priorités du gouvernement étaient loin d'être celles de la population. Il s'agit ici d'un effort pour compenser la première série de compressions dans le TCSPC, c'est-à-dire les transferts aux provinces au titre de la santé et des programmes sociaux, mais de façon ponctuelle, dans une atmosphère politiquement très lourde.

J'ai beaucoup de mal à accepter la componction des libéraux, qui font profession de générosité. Ils soulignent l'excellence de cette annonce et laissent entendre que cette mesure sera durable. L'opposition officielle appuie le principe de la péréquation. C'est le gouvernement qui donne mauvaise presse à la péréquation par ses réactions au coup par coup et ses expédients.

Le projet de loi a une portée très étroite, comme je l'ai dit. Il est limité à une année, mais le gouvernement tente de faire croire qu'il a une portée beaucoup plus vaste.

Nous souscrivons à la notion selon laquelle le gouvernement fédéral devrait assurer un accès égal aux services publics essentiels, à un niveau de fiscalité sensiblement comparable. Le système actuel pose de nombreux problèmes. Il devrait être beaucoup plus ouvert à la discussion.

J'ai écouté attentivement le député de St. John's-Ouest lorsqu'il a dit que le fonctionnement actuel du programme de péréquation nuit au développement économique, notamment dans le secteur des ressources naturelles non renouvelables.

Cela me rappelle la façon dont nous avons agi avec le Nord. Les paiements de péréquation ne visent que les provinces, mais dans le Nord il y a des territoires fédéraux: le Nunavut, le Grand Nord, les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon. Les transferts fédéraux accordés à ces territoires constituent la majeure partie de leurs revenus. Au moins 80 ou 90 p. 100 des revenus de ces territoires proviennent du gouvernement fédéral.

Ce programme de péréquation a toujours fonctionné de façon perverse. Si une région jouit d'une expansion économique, le gouvernement lui enlève à peu près tout ce qu'elle gagne. Quel est l'intérêt à devenir autonome? Cette façon de faire est contraire à la théorie économique et à une politique de développement sensée.

 

.1320 +-

Il suffit de regarder les économies de pays dont les populations se déplacent. J'ai entendu le secrétaire d'État chargé de l'Amérique latine et de l'Afrique s'enquérir de la demande de travailleurs spécialisés en Alberta. Comment recruter ces travailleurs? Comment les amener à s'installer dans cette province? Cette question est cruciale.

Elle est importante, car il est clairement démontré qu'une des principales raisons pour lesquelles l'économie des États-Unis est résistante et forte et que le chômage y est si peu élevé, c'est que, culturellement et par principe, la population est habituée de se rendre dans d'autres États pour chercher de l'emploi. La population américaine est la plus mobile au monde. C'est cela qui confère à l'économie américaine une telle force d'adaptation et qui diminue le chômage partout.

Tout pays qui agit de telle sorte qu'il soit plus commode de demeurer dans une région, au lieu d'explorer de nouveaux horizons, ne travaille pas dans l'intérêt de sa population. Le secrétaire d'État chargé de l'Amérique latine et de l'Afrique a abordé une question très importante, à laquelle nos jeunes réfléchissent beaucoup.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis vraiment impressionné. Les épithètes que j'ai utilisés pour décrire le député se sont avérés exacts. Il a fait un excellent discours.

J'ai une ou deux questions ou observations. Le premier ministre, au cours de sa tournée des provinces atlantiques pendant la campagne électorale, ou avant celle-ci, a modifié de façon importante la politique du gouvernement. Il a annoncé que le plafond de la péréquation serait supprimé pour une durée d'un an.

Que pense le député d'un gouvernement qui, en pleine année électorale, modifie de façon importante sa politique pour un an seulement? Si c'est une mesure nécessaire, ne devrait-elle pas être prise que l'on soit en période électorale ou non et ne devrait-elle pas ne pas être annulée une fois les élections terminées?

M. John Duncan: Monsieur le Président, je suis d'accord avec ça, mais j'y vois plus qu'un problème relatif au comportement du gouvernement ou du premier ministre. Le problème à mes yeux est que nous avons une démocratie parlementaire qui n'offre pas de moyens réels de ratifier les décisions du gouvernement.

 

.1325 +-

Par exemple, dans la plupart des démocraties occidentales, le premier ministre ou le président pourraient faire une déclaration comme celle du 11 septembre dernier, annonçant ce qu'ils ont l'intention de faire. Toutefois, il faudrait que cela fasse l'objet d'un débat et que ce soit ratifié, et il y aurait un grand degré d'incertitude quant à savoir si ça serait approuvé.

Au Canada, en revanche, notre démocratie est tellement déformée que l'approbation du Parlement est devenue une simple formalité. Le premier ministre ou même l'un de ses ministres peuvent maintenant faire ce genre de déclarations. L'annonce concernant la culture dont le député d'Elk Island a parlé est du même acabit.

La plus grosse portion des 560 millions de dollars annoncés hier par le premier ministre comprend 108 millions de dollars pour promouvoir et développer un contenu canadien sur Internet et plus particulièrement selon la ministre du Patrimoine, un contenu de langue française.

Depuis quand est-il utile de dépenser le budget consacré à la culture canadienne pour assurer notre présence sur Internet, domaine dont le secteur privé, les investisseurs privés, la bourse et autre se sont emparés dès le premier jour? Comment est-ce devenu une priorité? Comment a-t-on pu faire une annonce alors que rien ne s'est produit en cette enceinte permettant une telle annonce?

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole sur une question aussi importante que l'incidence marquée que les problèmes de péréquation ont sur les électeurs de Dartmouth, ma circonscription.

En termes clairs, conformément à l'actuelle formule de transfert, les électeurs de la Nouvelle-Écosse et de Dartmouth ne sont pas traités de la même manière que ceux des autres provinces. Je vais vous en parler brièvement cet après-midi.

Les Néo-Écossais doivent avoir accès à des chances égales, conformément au régime de transferts fédéraux. Malheureusement, un certain nombre de barrières, dans notre formule de péréquation, continuent de pénaliser les provinces démunies comme la Nouvelle-Écosse et les Canadiens ordinaires de Dartmouth qui travaillent très fort.

En termes clairs, le projet de loi C-18 ne satisfait pas aux réelles obligations constitutionnelles du gouvernement. Je tiens les préciser ici, car je ne suis pas certaine que nous tous, ici, les connaissions. Le paragraphe 36(2) de notre Constitution prévoit ceci:

Le Parlement et le gouvernement du Canada prennent l'engagement de principe de faire des paiements de péréquation propres à donner aux gouvernements provinciaux des revenus suffisants pour les mettre en mesure d'assurer les services publics à un niveau de qualité et de fiscalité sensiblement comparables.

Si l'on considère les normes des soins de santé et l'absence d'assurance-médicaments, le financement par élève des niveaux primaire, secondaire et postsecondaire, et les services offerts aux personnes qui vivent sous le seuil de la pauvreté, y compris les milliers de personnes handicapées de ma localité, en Nouvelle-Écosse, on voit tout de suite que les grands idéaux constitutionnels ne sont pas réalisés. Les Canadiens savent et maintes études montrent qu'il existe au Canada des inégalités importantes dans la qualité des services et les niveaux de fiscalité.

Je vous concéderai que certaines inégalités découlent de décisions provinciales. Beaucoup de gouvernements conservateurs, plutôt que de consacrer les excédents budgétaires à la reconstruction des programmes sociaux, ont accordé d'importantes réductions d'impôt qui profitent surtout aux riches. Ce n'est pas la faute de la péréquation.

Certaines inégalités découlent de la capacité de certaines provinces de tirer des recettes de l'exploitation de leurs ressources. Il ne fait aucun doute que la province de l'Alberta a beaucoup profité du fait qu'elle est située sur de grands lacs souterrains de pétrole et de gaz. Elle touche toutes les redevances tirées de l'exploitation de ces ressources. Les formules de péréquation en tiennent compte dans une certaine mesure. Toutefois, une autre inégalité est en jeu ici.

 

.1330 +-

Les provinces ne peuvent tirer de revenu des ressources pétrolières et gazières extracôtières comme elles peuvent en tirer des ressources pétrolières et gazières terrestres. Les provinces démunies du Canada atlantique n'ont donc pas la capacité d'offrir autant de programmes que l'Alberta.

Je sais que les ressources extracôtières et terrestres ne sont pas régies par les mêmes lois, mais il est difficile d'expliquer ces subtilités juridiques aux habitants de la Nouvelle-Écosse. Depuis la fondation de leur province, il y a environ 400 ans, ils vivent autant des ressources de la mer que des ressources de la terre.

C'est impossible de faire comprendre aux Néo-Écossais que le gaz de l'île de Sable n'appartient pas à leur province alors que les sables bitumineux de l'Alberta appartient à cette province de l'Ouest. Ils ne comprennent pas cet argument juridique. Ils constatent simplement que l'application de règles injustes établies par le centre et l'ouest du Canada les maintient dans la pauvreté et ils n'ont pas tort. Le gouvernement ne les traite pas de façon équitable, mais il pourrait le faire s'il le voulait.

Par exemple, par le passé, le gouvernement a accordé à Terre-Neuve et au Labrador une exemption temporaire, selon laquelle les recettes tirées des redevances n'entraient pas dans le calcul des paiements de péréquation. Cette mesure temporaire a grandement contribué à relancer l'économie de cette province, et la Nouvelle-Écosse mérite la même chose.

J'exhorte le gouvernement à accorder à la Nouvelle-Écosse la même exemption qui a été consentie à Terre-Neuve et au Labrador. Comme l'a dit si éloquemment dans le cadre du débat d'aujourd'hui mon chef et ma collègue, la députée de Halifax, les compressions que les libéraux ont imposées à l'égard du TCSPS et du Régime d'assistance publique du Canada ainsi que l'approche générale qu'ils ont privilégiée en accordant la priorité aux réductions d'impôt plutôt qu'à la reconstruction de nos programmes sociaux, tout cela a frappé très durement le Canada atlantique.

Pour les gouvernements du Canada atlantique, ce sont là des obstacles stratégiques que le gouvernement fédéral devrait supprimer tout en s'acquittant de son obligation constitutionnelle qui consiste à assurer une équité au niveau des services, au moyen de la formule de péréquation.

Le projet de loi C-18 laisse en place certains obstacles. Le plus important obstacle, c'est le plafond qui s'applique aux paiements de péréquation. Il doit être supprimé. Je ne suis pas la seule à penser cela. Comme on l'a mentionné, les premiers ministres et les ministres des provinces ont porté cela à notre attention. Le projet de loi C-18 ne supprime pas le plafond artificiel qui s'applique aux paiements de péréquation des provinces les plus pauvres pour le présent exercice financier. Cela signifie que l'Ontario et l'Alberta conservent une plus large part et que le Canada atlantique conserve une part plus modeste. Comment les libéraux peuvent-ils justifier cela? Savent-ils ce que cela signifie pour les habitants du Canada atlantique?

Ce que cela signifie, c'est que les étudiants de Dartmouth sont en plus grande difficulté parce qu'ils ont moins de financement et que les conflits syndicaux se multiplient au sein des conseils scolaires parce que les administrateurs essaient d'arracher des concessions à des travailleurs déjà sous-payés. Cela signifie que nos étudiants au niveau postsecondaire paient les frais de scolarité les plus élevés au Canada et qu'ils disposent des programmes d'aide aux étudiants les plus inefficaces. Cela signifie que moins de malades ont les moyens de se payer les médicaments que leur médecin leur prescrit et dont ils ont besoin pour rester en vie. Cela n'est pas juste et cela n'est pas équitable. Cela ne respecte pas les objectifs nobles énoncés dans notre Constitution.

En ce qui concerne plus particulièrement l'enseignement postsecondaire, je demande encore une fois au gouvernement fédéral d'augmenter l'aide qu'il accorde pour répondre aux besoins légitimes de l'enseignement postsecondaire en Nouvelle-Écosse, en concluant un accord bilatéral qui tiendrait compte du prix énorme que les Néo-Écossais paient pour soutenir un nombre disproportionné d'étudiants qui viennent de l'extérieur de leur province.

J'espère que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse utiliserait alors les fonds qu'il obtiendrait pour réduire les frais de scolarité des Néo-Écossais qui sont actuellement les plus élevés au Canada et pour accroître l'aide insuffisante prévue pour les étudiants. Les Canadiens de l'Atlantique ne demandent pas la charité. Ils veulent l'équité. Malheureusement, notre parti ne croit pas que le projet de loi C-18 leur garantira cette équité.

M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il y a un problème au Canada quand on élabore des politiques en se fondant non pas sur d'excellentes raisons ou sur le gros bon sens, mais strictement sur la politique. Nous en avons un exemple ici.

Je voudrais faire part à la Chambre de quelques observations formulées par un groupe de travail constitué en 1995. Le greffier du Conseil privé avait demandé à Ivan Fellegi de présider un groupe de travail formé de hauts fonctionnaires et chargé d'étudier la capacité de recherche sur les politiques du gouvernement. Le groupe de travail a présenté son rapport en avril 1995 en concluant que:

Les faiblesses les plus frappantes à ce moment ont trait aux questions stratégiques et horizontales à long terme. Les ressources sont consommées de façon disproportionnée par des demandes à court terme.

 

.1335 +-

Au fond, le comité condamnait la manière dont le gouvernement élabore des politiques. Dans ses observations, il fait clairement ressortir la motivation politique qui sous-tend beaucoup trop de politiques gouvernementales mal conçues.

Nous en avons un exemple aujourd'hui. Le projet de loi présenté par le gouvernement vient après-coup. Il est conçu dans le but de remplir une promesse électorale faite par un premier ministre à un groupe de Canadiens de la région de l'Atlantique qu'il voulait convaincre de voter en sa faveur. C'est clair. Les gens d'en face voient bien que c'est la vérité.

Est-ce ainsi qu'il faut élaborer des politiques? Les politiques devraient-elles être communiquées de cette façon à la population canadienne? De toute évidence, la réponse est non.

Ce projet de loi reflète la capacité du gouvernement d'agir instinctivement, plutôt que de planifier. Aucun processus de consultation n'avait précédé les promesses du premier ministre. Ce dernier n'a pas à consulter qui que ce soit, mais il aurait avantage à le faire. Le premier ministre a souvent fait des annonces au nom de divers ministres, parfois sans les consulter. Par exemple, le premier ministre a annoncé le fonds des bourses d'études du millénaire sans consulter son ministre des Finances. Ce n'est pas ainsi qu'on élabore des politiques et qu'on bâtit un meilleur Canada.

Dans le présent cas, le problème est différent. Les gens du Canada atlantique ont un problème car, dans bon nombre de régions du Canada atlantique, les habitants ont élu des députés libéraux. Les électeurs ont délégué des députés libéraux à Ottawa non pas parce que leurs votes avaient été achetés, car une telle façon d'agir n'est pas dans la nature des gens du Canada atlantique selon ce que j'en sais, mais plutôt parce qu'ils voulaient qu'ils représentent bien leurs circonscriptions.

Cependant, je n'ai entendu personne défendre les gens du Canada atlantique dans le dossier de la formule de péréquation. Du côté des libéraux, personne n'est intervenu à la Chambre pour condamner vigoureusement les paroles du premier ministre ou son inaction, de même que l'inaction du ministre des Finances à l'égard de cette question. C'est une véritable honte.

J'ai entendu des députés du Canada atlantique. Ils n'ont pas attaqué l'approche du premier ministre dans ce dossier, ni son manque de compassion pour les besoins des gens de leurs régions ou d'autres régions, comme la mienne au Manitoba, ou en Saskatchewan, deux provinces qui comptent largement sur les paiements de péréquation pour offrir à leurs habitants le genre de services qu'ils méritent. Je n'ai entendu aucune intervention en ce sens.

J'ai plutôt entendu des députés attaquer à la Chambre les politiciens provinciaux de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick. Je me demande quelle est la sagesse de ces attaques personnelles, basses et partisanes. Je me demande pourquoi les députés d'en face prennent la parole pour critiquer les partis au pouvoir en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick.

La seule raison, semble-t-il, c'est que ce sont des gouvernements progressistes conservateurs. C'est une bien maigre raison. Cela semble aller à l'encontre de ce que leurs électeurs veulent, à savoir qu'ils épaulent les premiers ministres Lord et Hamm ainsi que bien d'autres dans le Canada atlantique. Leurs électeurs cherchent assidûment à faire réexaminer la formule pour faire en sorte que leur population obtienne les ressources dont elle a besoin au moyen d'une formule juste.

Nous voyons la pire manifestation de l'esprit de parti à la Chambre quand les députés d'en face ne soulèvent pas dans cette enceinte des questions importantes pour leurs électeurs. Il y a des divisions très nettes au sein du caucus libéral et entre différents ministres sur cette question.

 

.1340 +-

Le ministre de l'Industrie criait très fort comme un coq dans sa basse-cour quand il exigeait une refonte de la formule à l'époque où il était premier ministre de Terre-Neuve. Je ne l'ai pas entendu le faire à la Chambre depuis son retour à Ottawa. Peut-être a-t-il un autre programme en tête. Je ne l'ai pas entendu défendre fermement la population de Terre-Neuve à cet égard. Je ne l'ai pas vu et je ne l'ai pas entendu.

Le ministre a pris la parole sur bien d'autres questions, comme la population de Terre-Neuve l'a entendu le faire quand il était là-bas. Quand elle lui a dit au revoir, elle s'attendait sûrement à ce qu'il aille la défendre à Ottawa. Cela n'a pas été évident.

Le ministre des Finances n'a pas démontré d'intérêt lui non plus. Il a prévenu ses homologues provinciaux qu'on n'allait pas ouvrir ce dossier. Il a dit qu'une seule loi était suffisante. Cette loi spéciale et cette politique de broche à foin intéressée ne sont pas une façon de traiter d'une question aussi importante pour les Canadiens.

Pour une raison quelconque, le ministre des Finances refuse d'ouvrir le dossier. Est-ce parce qu'il ne veut pas attribuer un certain mérite au ministre de l'Industrie, qui agit peut-être en coulisses, en tout cas pas de façon qu'on le remarque? Il est malheureux qu'on ait eu droit à un débat fermé. Seules quelques personnes ont pu y participer. Ce n'est pas le genre de formule pour établir des politiques dont veulent les gens.

J'ai écouté le débat avec intérêt. Malheureusement, les députés ont mal interprété la politique de l'Alliance canadienne. J'aimerais exposer notre politique sur le sujet. Nous reconnaissons qu'il y a des provinces et des régions qui sont riches et d'autres qui le sont moins, mais toutes veulent offrir des services similaires à leur population.

Nous sommes acquis au principe constitutionnel des paiements de péréquation, qui sont versés dans le but de s'assurer que les gouvernements provinciaux disposent de suffisamment de revenus pour offrir à la population des niveaux assez comparables de services, à des taux d'imposition assez comparables. Telle est la politique de l'Alliance. Elle n'a rien à voir avec celle qui a été décrite par des députés d'en face.

Notre politique reflète le désir de notre parti d'assurer un traitement juste et équitable à tous les Canadiens. Nous croyons que la péréquation devrait servir, pour le long terme, à égaliser les perspectives et l'autonomie économiques de toutes les régions et ne devrait pas favoriser l'adoption de politiques économiques perverses. Elle ne devrait pas servir à de simples fins politiques. Elle devrait plutôt servir aux fins prévues à l'origine, soit aider les gens à s'en sortir, et pas simplement permettre au gouvernement d'essayer d'acheter des appuis.

Dans son livre intitulé Governing from the Centre, Donald Savoie a fait des observations concernant la nature de la façon dont le gouvernement a choisi d'élaborer sa politique. Il dit:

Je reconnais que les pouvoirs centraux, et plus particulièrement ceux du premier ministre, ont été considérablement renforcés au cours des dernières années, mais je ne considère pas pour autant que le gouvernement fédéral est mieux en mesure de définir une nouvelle orientation stratégique ou un plan cohérent auquel tous les ministères pourraient contribuer. Il est ironique de constater qu'en affermissant les pouvoirs du gouvernement central, on a affaibli ses capacités à gérer des questions horizontales.

On le constate dans de nombreux domaines et c'est certes évident dans ce dossier. L'influence du premier ministre se fait sentir dans toute cette mesure législative. Son intention d'utiliser des mesures législatives comme celle-ci pour tenir des promesses préélectorales est évidente.

Jusqu'à quel point le gouvernement est-il capable de s'occuper des questions horizontales qui touchent toutes les régions du pays? Selon Donald Savoie, un éminent observateur des questions politiques depuis des décennies, la capacité du gouvernement de gérer les questions horizontales auxquelles notre pays est confronté a été considérablement affaiblie.

Nous le constatons ici et dans de nombreux domaines. Notre désir en tant que mouvement politique est de nous assurer que tout le monde au Canada sent qu'il fait partie du Canada. Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle. Nous avons un fédéralisme centralisateur qui fait que le gouvernement élabore et met en oeuvre des politiques qui ne reflètent pas vraiment le tissu social canadien. Nous constatons trop souvent qu'il est disposé à prendre des décisions partisanes plutôt que d'élaborer une bonne politique, complète, intelligente et prévoyante.

 

.1345 +-

Le Conseil pour l'unité canadienne élabore des idées et cherche des façons d'accroître le sentiment d'appartenance à la société canadienne qu'on devrait retrouver dans toutes les régions du pays. Il vient de publier les résultats d'une étude qu'il a effectuée. Ces résultats sont vraiment décourageants et ils devraient l'être pour tous les députés.

On a posé la question suivante: «Croyez-vous que le gouvernement fédéral respecte les provinces?» Les résultats, classés par province, brossaient un tableau assez triste de la situation. Le gouvernement obtient la note de passage dans une seule province canadienne, l'Ontario. Ailleurs, de l'Atlantique au Pacifique, le sondage du Conseil pour l'unité canadienne révèle que les Canadiens ne croient pas que leur province est traitée avec respect par le gouvernement fédéral.

C'est là une condamnation de la manière dont le gouvernement a choisi d'élaborer ses politiques. Peut-être est-ce aussi une condamnation de la manière dont il a choisi de communiquer. Or, je doute très sérieusement que, par exemple, les petites sorties dans l'Ouest dont le but n'est que de bien paraître changeront quelque chose à la perception que les Canadiens de l'Ouest ont du gouvernement.

Ce que les Canadiens de l'Ouest attendent, et ce que les Canadiens des Maritimes attendent, je crois, c'est un vrai changement, un véritable changement d'attitude du gouvernement face aux régions, un véritable changement dans la façon dont le gouvernement élabore ses politiques et consulte. Je crois qu'ils attendent un véritable changement dans la façon dont le gouvernement et le premier ministre se représentent la nécessité bien réelle de réformes démocratiques et d'ouverture à la Chambre des communes et ailleurs. Je crois qu'ils attendent un véritable changement dans l'approche institutionnelle que nous avons élaborée au fil des ans, un changement afin que les citoyens aient un sentiment plus profond d'appartenance au Canada, un sentiment plus profond d'avoir un rôle à jouer dans le pays, leur donnant l'impression que leur opinion compte et qu'ils sont respectés.

Le gouvernement a accueilli les résultats de ce sondage par un profond silence, mais j'espère sincèrement que, dans les jours à venir, nous n'aurons pas à examiner d'autres initiatives de ce genre, qui ont pour seul et unique objet de permettre au premier ministre de tenir les promesses qu'il a faites sans avoir consulté les membres de son caucus et les Canadiens, dans le seul but de se faire un capital électoral. Nous ne devrions pas avoir à traiter de projets de loi de ce genre à la Chambre, et pourtant c'est ce que nous faisons aujourd'hui.

Je termine en rappelant que l'Alliance canadienne continuera, comme je le ferai en ma qualité de porte-parole de mon parti pour les questions d'équité régionale, à rechercher sincèrement des moyens pour faire du Canada un pays dont les citoyens sont partie prenante, un pays où les citoyens se sentent respectés. Cela n'a pas été le cas durant le mandat du gouvernement.

 

.1350 +-

Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Bélair): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Bélair): Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le président suppléant (M. Bélair): Le whip du gouvernement m'apprend que le vote par appel nominal sur la motion est reporté à lundi, à la suite des initiatives ministérielles.

Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Les partis se sont consultés et vous trouverez qu'il y a consentement unanime pour que le vote qui vient d'être reporté à lundi le soit à mardi, après les initiatives ministérielles.

Le président suppléant (M. Bélair): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.  

Le président suppléant (M. Bélair): Conformément au paragraphe 76(8) du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est reporté.


 

Le mardi 8 mai 2001

La séance est ouverte à 10 heures.

 


INITIATIVES MINISTÉRIELLES

.1750 +-

[Traduction]

 

*  *  *

LOI MODIFIANT LA LOI SUR LES ARRANGEMENTS FISCAUX ENTRE LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL ET LES PROVINCES

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 mai, de la motion: Que le projet de loi C-18, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, soit lu pour la troisième fois et adopté.

Le vice-président: La Chambre passe maintenant au vote par appel nominal à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-18.

Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, je crois que vous obtiendrez le consentement de la Chambre pour que les députés qui ont voté sur la motion précédente, à l'exception du député de Calgary-Centre, soient inscrits comme ayant voté sur la motion dont la Chambre est maintenant saisie, les députés libéraux votant oui.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que nous procédions de cette façon?

Des voix: D'accord.

M. Richard Harris: Monsieur le Président, les députés de l'Alliance canadienne voteront contre la motion.

[Français]

Mme Caroline St-Hilaire: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois sont favorables à cette motion.

M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés du NPD votent non à cette motion.

[Traduction]

M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, je remercie certes le whip du Parti libéral pour son aide. Toutefois, les députés du Parti progressiste-conservateur voteront en faveur de cette motion, sauf le très honorable député de Calgary-Centre, qui avait un avion à prendre.

[Français]

(La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)

Vote no 88

POUR

Députés

 

 

Adams

Alcock

Allard

Anderson (Victoria)

Assad

Asselin

Bachand (Richmond – Arthabaska)

Bachand (Saint - Jean)

Bakopanos

Barnes

Beaumier

Bélair

Bélanger

Bellehumeur

Bellemare

Bennett

Bertrand

Bigras

Binet

Blondin - Andrew

Bonin

Bonwick

Borotsik

Boudria

Bourgeois

Bradshaw

Brien

Brison

Brown

Bryden

Byrne

Caccia

Calder

Cannis

Caplan

Cardin

Carignan

Castonguay

Catterall

Chamberlain

Charbonneau

Chrétien

Coderre

Collenette

Comuzzi

Copps

Cotler

Crête

Cullen

Cuzner

Desrochers

DeVillers

Dhaliwal

Doyle

Dromisky

Drouin

Dubé

Duceppe

Duhamel

Duplain

Eggleton

Eyking

Farrah

Finlay

Fontana

Fournier

Fry

Gagliano

Gagnon (Champlain)

Gagnon (Québec)

Gallaway

Girard - Bujold

Godfrey

Goodale

Graham

Gray (Windsor West)

Grose

Guarnieri

Guay

Harvard

Harvey

Hearn

Herron

Hubbard

Ianno

Jackson

Jennings

Jordan

Keyes

Kilgour (Edmonton Southeast)

Knutson

Kraft Sloan

Laframboise

Laliberte

Lastewka

Lavigne

Lebel

Lee

Leung

Lincoln

Longfield

Loubier

MacAulay

MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough)

Macklin

Mahoney

Malhi

Maloney

Marceau

Marcil

Marleau

Matthews

McCallum

McCormick

McGuire

McKay (Scarborough East)

McLellan

McTeague

Ménard

Mills (Toronto – Danforth)

Mitchell

Murphy

Myers

Nault

Neville

Normand

O'Brien (London – Fanshawe)

O'Reilly

Owen

Pagtakhan

Paquette

Paradis

Parrish

Peric

Perron

Phinney

Pickard (Chatham – Kent Essex)

Pillitteri

Plamondon

Proulx

Provenzano

Redman

Reed (Halton)

Regan

Richardson

Robillard

Rocheleau

Rock

Roy

Saada

Sauvageau

Savoy

Scherrer

Scott

Serré

Sgro

Shepherd

Speller

St. Denis

St - Hilaire

St - Jacques

St - Julien

Steckle

Stewart

Szabo

Thibault (West Nova)

Thibeault (Saint - Lambert)

Thompson (New Brunswick Southwest)

Tirabassi

Tobin

Tonks

Torsney

Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay)

Ur

Valeri

Vanclief

Venne

Volpe

Wayne

Whelan

Wilfert

Wood – 182

 

 


CONTRE

Députés

 

 

Abbott

Anderson (Cypress Hills – Grasslands)

Bailey

Benoit

Blaikie

Breitkreuz

Burton

Cadman

Casson

Chatters

Comartin

Cummins

Davies

Day

Desjarlais

Elley

Epp

Forseth

Gallant

Godin

Goldring

Gouk

Grey (Edmonton North)

Harris

Hill (Macleod)

Hill (Prince George – Peace River)

Hilstrom

Jaffer

Johnston

Kenney (Calgary Southeast)

Lill

Lunn (Saanich – Gulf Islands)

Manning

Mark

Martin (Esquimalt – Juan de Fuca)

Martin (Winnipeg Centre)

Mayfield

McNally

Meredith

Merrifield

Mills (Red Deer)

Moore

Nystrom

Obhrai

Pallister

Pankiw

Peschisolido

Proctor

Rajotte

Reid (Lanark – Carleton)

Ritz

Robinson

Schmidt

Skelton

Solberg

Sorenson

Spencer

Stinson

Strahl

Thompson (Wild Rose)

Toews

Vellacott

Wasylycia - Leis

Williams

Yelich – 65

 

 

 


«PAIRÉS»

Députés

 

 

Augustine

Bergeron

Bulte

Carroll

Cauchon

Dalphond - Guiral

Dion

Gauthier

Guimond

Harb

Lalonde

Lanctôt

Minna

Patry

Picard (Drummond)

Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis)


 

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)