Louis A. Desrochers : la perte d'un grand homme et d'un grand ami du Campus Saint-Jean

Au cours des années, de nombreux Franco-Albertains ont contribué à développer et faire rayonner la francophonie albertaine. On peut penser aux Marie-Anne Gaboury, Maurice Lavallée, Fernando Girard, Guy Lacombe, Georges Bugnet, Jules Van Brabant, Marguerite Dentinger, etc. À cette liste, et tout près du haut de celle-ci, on retrouve Louis A. Desrochers.

Étienne Alary - 6 octobre 2015

Ce qui le distingue de tous les grands leaders : sa contribution à la fois à la communauté franco-albertaine et à l'Université de l'Alberta.

En effet, cet ancien président de l'ACFA, de 1962 à 1964, a joué un rôle de premier plan dans l'avancement de plusieurs dossiers majeurs : la création de CHFA (radio de Radio-Canada en Alberta), du théâtre français et de l'Association des juristes d'expression française de l'Alberta.

Au sein de l'Université de l'Alberta, il aura été au cœur des échanges visant à ce que le Collège universitaire Saint-Jean devienne une faculté à part entière, la Faculté Saint-Jean, au sein de l'université. « L'institution francophone qui lui doit la plus grande dette, c'est bien la Faculté Saint-Jean d'Edmonton », lance sans hésiter Frank McMahon, premier doyen de la Faculté, qui a bien connu Louis A. Desrochers.

« Dès 1960, il participait à l'évolution du Collège Saint-Jean avec le développement du programme de pédagogie. Dès 1964, alors qu'il est membre du bureau des gouverneurs de l'Université, il développe le projet d'une intégration de Saint-Jean à celle-ci afin d'obtenir pour Saint-Jean un plein financement à même les fonds publics », explique-t-il.

Louis A. Desrochers a mené ce dossier de main de maître. « Au début, la résistance à l'intérieur de l'Université était très forte, mais l'intelligence, la diplomatie, le charme irrésistible de ce grand francophone sont venus à bout de tous les acteurs clefs. Il avait l'appui évidemment de l'administration de Saint-Jean et des leaders francophones, mais l'intégration s'est faite très largement à cause de son influence », estime Frank McMahon.

« Je sais qu'il a investi une énergie extraordinaire pour aller chercher le million de dollars du gouvernement canadien qui a permis l'achat des bâtiments et du terrain et consacrer ainsi l'avenir de Saint-Jean. Lors d'une réunion au sujet de cet octroi, il m'avoua que c'était la seule fois de sa vie qu'il avait passé une nuit blanche », se rappelle M. McMahon.

Fait à noter, au terme de son mandat au bureau des gouverneurs, Louis A. Desrochers devient, en 1970, chancelier de l'Université de l'Alberta, poste qu'il occupe jusqu'en 1974.

Pendant 25 ans, Louis Desrochers agira comme président du comité consultatif de la Faculté Saint-Jean; poste qu'occupe aujourd'hui son fils Pierre Desrochers. Il démissionne en 2000, mais il en reste président émérite. En 1994, Louis A. Desrochers est fait membre de l'Ordre du Canada et, en 2001, il reçoit l'Alberta Order of Excellence.

Cette même année, le Professorat Louis Desrochers en études canadiennes est mis en place en son honneur afin de reconnaître sa contribution à l'Alberta et à la communauté francophone canadienne. « C'était un grand leader de la francophonie qui a toujours manifesté un appui indéfectible à Saint-Jean, que ce soit le Collège Saint-Jean, le Collège universitaire Saint-Jean, la Faculté Saint-Jean ou le Campus Saint-Jean. À ma grande fierté, il a accepté de prêter son nom à la série de conférences Louis Desrochers que j'ai établie lors de mon décanat en reconnaissance de ses nombreuses contributions et de son leadership. C'était toujours un grand plaisir de le voir à nos fonctions », se remémore la sénatrice Claudette Tardif.

Le professeur Claude Couture, membre fondateur de l'Institut d'études canadiennes et directeur entre 2001 et 2009, se rappelle bien de M. Desrochers. « Après les présentations lors des conférences en études canadiennes qui portaient son nom, Louis Desrochers était toujours le premier à briser la glace et à poser la première question. Ses questions étaient toujours claires, précises, pertinentes et témoignaient de sa vive curiosité. Les conférenciers étaient toujours très impressionnés par la vivacité de son esprit », avance le professeur Couture. « Le monde francophone perd un grand leader », enchaîne-t-il.

Pour l'actuel doyen du Campus Saint-Jean, Pierre-Yves Mocquais, il est important que le nom de M. Desrochers soit à jamais associé à l'établissement universitaire francophone. « Sans Louis A. Desrochers, le Campus Saint-Jean ne serait certainement pas ce qu'il est aujourd'hui, soit un carrefour de vie académique, linguistique et culturelle unique qui se démarque dans tout l'Ouest canadien par sa langue d'usage, le français », énonce M. Mocquais.

Aujourd'hui, le nom de Louis A. Desrochers demeure étroitement lié au Campus Saint-Jean. En effet, trois fonds de dotation portent son nom :

  • Le fonds Louis Desrochers pour l'Institut d'études canadiennes qui sert à financer les opérations et les recherches de l'Institut ainsi que la série de conférences Louis Desrochers et les coûts afférents;
  • Le professorat Louis Desrochers, qui sert à financer un poste de professeur invité dans le domaine des études canadiennes;
  • Le fonds boursier Marcelle et Louis Desrochers pour les études canadiennes, qui sert à financer une bourse à l'intention d'un étudiant de deuxième cycle dans la poursuite de ses études en études canadiennes ou un domaine afférent.